La Maison de campagne de d’Horace

Fiction & Literature, Historical
Cover of the book La Maison de campagne de d’Horace by GASTON BOISSIER, GILBERT TEROL
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Author: GASTON BOISSIER ISBN: 1230001718782
Publisher: GILBERT TEROL Publication: June 14, 2017
Imprint: Language: French
Author: GASTON BOISSIER
ISBN: 1230001718782
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: June 14, 2017
Imprint:
Language: French

Présentation de l'éditeur ;

Ce livre comporte une table des matières dynamique, à été relu et corrigé.

Il est parfaitement mis en page pour une lecture sur liseuse électronique.

Extrait :

Il est impossible de lire Horace sans désirer connaître cette maison de campagne où il a été si heureux. Peut-on savoir exactement où elle était ? Est-il possible de retrouver, non pas les pierres même de sa villa, que le temps a sans doute dispersées, mais le site charmant qu’il a tant de fois décrit, ces hautes montagnes « qui abritaient ses chèvres des feux de l’été, » cette fontaine près de laquelle il allait s’étendre aux heures chaudes du jour, ces bois, ces ruisseaux, ces vallées, cette nature enfin qu’il a eue sous les yeux pendant la plus longue et la meilleure partie de sa vie ? C’est une question qu’on se pose depuis la renaissance, et l’on en a d’assez bonne heure entrevu la solution. Vers la fin du xvie siècle, quelques érudits, qui s’étaient mis en quête de la maison d’Horace, soupçonnèrent l’endroit où il fallait la chercher ; mais, comme leurs indications étaient vagues et qu’elles ne s’appuyaient pas toujours sur des preuves bien solides, ils ne parvinrent pas à convaincre tout le monde. Du reste, il ne manquait pas de gens qui ne voulaient pas être convaincus. Dans tous les coins de la Sabine, des savans de village réclamaient avec acharnement pour leur pays l’honneur d’avoir donné l’hospitalité à Horace et n’entendaient pas qu’il en fût dépossédé. C’est ainsi qu’on mettait sa maison de campagne à Tibur, à Cures, à Réate, un peu partout, excepté où elle devait être.

Le problème a été définitivement résolu, dans la seconde moitié du dernier siècle, par un Français, l’abbé Cap martin de Chaupy. C’était un de ces amoureux de Rome qui vont pour y passer quelques mois et y restent toute leur vie. Quand il se fut décidé à retrouver la maison d’Horace, il n’épargna pas sa peine[1] ; il parcourut presque toute l’Italie, étudiant les monumens, lisant les inscriptions, faisant parler les gens du pays, cherchant de ses yeux quels sites répondaient le mieux aux descriptions du poète. Il voyageait à petites journées sur un cheval qui, s’il faut l’en croire, était devenu presque antiquaire à force d’être conduit aux antiquités. Cet animal, nous dit-il, allait de lui-même aux ruines sans avoir besoin d’être averti, et sa fatigue semblait cesser quand il se trouvait sur le pavé de quelque voie antique. Du récit de ses courses, des résultats où ses travaux obstinés l’avaient conduit, Cap martin de Chaupy a composé trois gros volumes de près de cinq cents pages chacun. C’est beaucoup plus que ne comportait la question ; aussi ne s’est-il pas imposé la loi de s’enfermer dans le sujet qu’il traite. La maison de campagne d’Horace n’est pour lui qu’un prétexte qui lui donne l’occasion de parler de tout. Il a écrit comme il voyageait, s’arrêtant à chaque pas et quittant à tout moment la grand’route pour s’enfoncer dans les chemins de traverse. Il ne nous fait grâce de rien ; il éclaire en passant des points obscurs de géographie et d’histoire, relève des inscriptions, retrouve des villes perdues, détermine la direction des anciennes voies. Cette façon de procéder, qui était alors fort à la mode parmi les érudits, eut pour Chaupy un très grave inconvénient. Pendant qu’il s’attardait ainsi en chemin, on faillit lui enlever l’honneur de sa découverte. Un savant de Rome, de Sanctis, qui avait entendu parler de ses travaux, se mit sur la même piste, et, le gagnant de vitesse, ce qui n’était pas difficile, publia sur cette question une petite dissertation que le public accueillit favorablement. Ce fut un grand chagrin pour le pauvre abbé, qui s’en plaignit avec amertume. Heureusement ses trois volumes, qui furent bientôt en état de paraître, mirent l’opinion de son côté, et aujourd’hui on ne lui conteste guère la gloire, dont il était si fier, d’avoir découvert la maison de campagne d’Horace.

Voici en quelques mots comment il s’y prend pour démontrer aux plus incrédules qu’il ne s’est pas trompé. Il établit d’abord qu’Horace n’avait pas plusieurs domaines ; lui-même nous dit qu’il ne possède que le bien de la Sabine et que ce bien lui suffit : satis beatus unicis Sabinis. Il s’ensuit que toutes les descriptions qu’il a faites se rapportent à celui-là et doivent lui convenir. Ce principe établi, Chaupy visite successivement tous les endroits où l’on a voulu placer la maison du poète et n’a pas de peine à montrer qu’aucun ne répond tout à fait aux tableaux qu’il en a tracés. C’est seulement à l’est de Tivoli et dans les environs de Vicovaro qu’elle peut être ; ce lieu est le seul où tout s’accorde entièrement avec les vers d’Horace. Ce qui est plus frappant encore et achève de nous convaincre, c’est que les noms modernes y ont conservé leur apparence antique. Nous savons par Horace que la ville la plus voisine de sa maison et la plus importante, celle où ses métayers se rendaient tous les jours de marché, s’appelait Varia. La table de Peutinger mentionne aussi Varia et la place à 8 milles de Tibur ; or, à 8 milles de Tivoli, l’ancien Tibur, nous trouvons aujourd’hui Vicovaro, qui a gardé presque entièrement son ancienne dénomination (Vicus Varia), Au pied de Vicovaro coule un petit ruisseau qu’on appelle la Licenza : c’est, avec très peu de changemens, la Digentia d’Horace. Il nous dit que ce ruisseau arrose le petit bourg de Mandela ; aujourd’hui Mandela est devenu Bardela, ce qui est à peu près la même chose, et pour qu’aucun doute ne soit possible, une inscription qu’on y a trouvée lui restitue tout à fait son ancien nom. Enfin la haute montagne du Lucrétile, qui donnait de l’ombre à la maison du poète, est le Corgnaleto, qui s’appelait encore dans les chartes du moyen âge Mons Lucretii. Ce ne peut pas être le hasard qui a réuni dans le même endroit tous les noms de lieux mentionnés par le poète ; ce n’est pas le hasard non plus qui fait que ce canton de la Sabine est si parfaitement conforme à toutes ses descriptions. Il est donc certain que sa maison de campagne était placée dans cette plaine qu’arrose la Licenza, sur les rampes du Corgnaleto, non loin de Vicovaro et de Bardela. C’est là qu’il faut adresser les adorateurs d’Horace, — Dieu sait s’il en reste ! — quand ils veulent faire à sa villa un pieux pèlerinage.

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Présentation de l'éditeur ;

Ce livre comporte une table des matières dynamique, à été relu et corrigé.

Il est parfaitement mis en page pour une lecture sur liseuse électronique.

Extrait :

Il est impossible de lire Horace sans désirer connaître cette maison de campagne où il a été si heureux. Peut-on savoir exactement où elle était ? Est-il possible de retrouver, non pas les pierres même de sa villa, que le temps a sans doute dispersées, mais le site charmant qu’il a tant de fois décrit, ces hautes montagnes « qui abritaient ses chèvres des feux de l’été, » cette fontaine près de laquelle il allait s’étendre aux heures chaudes du jour, ces bois, ces ruisseaux, ces vallées, cette nature enfin qu’il a eue sous les yeux pendant la plus longue et la meilleure partie de sa vie ? C’est une question qu’on se pose depuis la renaissance, et l’on en a d’assez bonne heure entrevu la solution. Vers la fin du xvie siècle, quelques érudits, qui s’étaient mis en quête de la maison d’Horace, soupçonnèrent l’endroit où il fallait la chercher ; mais, comme leurs indications étaient vagues et qu’elles ne s’appuyaient pas toujours sur des preuves bien solides, ils ne parvinrent pas à convaincre tout le monde. Du reste, il ne manquait pas de gens qui ne voulaient pas être convaincus. Dans tous les coins de la Sabine, des savans de village réclamaient avec acharnement pour leur pays l’honneur d’avoir donné l’hospitalité à Horace et n’entendaient pas qu’il en fût dépossédé. C’est ainsi qu’on mettait sa maison de campagne à Tibur, à Cures, à Réate, un peu partout, excepté où elle devait être.

Le problème a été définitivement résolu, dans la seconde moitié du dernier siècle, par un Français, l’abbé Cap martin de Chaupy. C’était un de ces amoureux de Rome qui vont pour y passer quelques mois et y restent toute leur vie. Quand il se fut décidé à retrouver la maison d’Horace, il n’épargna pas sa peine[1] ; il parcourut presque toute l’Italie, étudiant les monumens, lisant les inscriptions, faisant parler les gens du pays, cherchant de ses yeux quels sites répondaient le mieux aux descriptions du poète. Il voyageait à petites journées sur un cheval qui, s’il faut l’en croire, était devenu presque antiquaire à force d’être conduit aux antiquités. Cet animal, nous dit-il, allait de lui-même aux ruines sans avoir besoin d’être averti, et sa fatigue semblait cesser quand il se trouvait sur le pavé de quelque voie antique. Du récit de ses courses, des résultats où ses travaux obstinés l’avaient conduit, Cap martin de Chaupy a composé trois gros volumes de près de cinq cents pages chacun. C’est beaucoup plus que ne comportait la question ; aussi ne s’est-il pas imposé la loi de s’enfermer dans le sujet qu’il traite. La maison de campagne d’Horace n’est pour lui qu’un prétexte qui lui donne l’occasion de parler de tout. Il a écrit comme il voyageait, s’arrêtant à chaque pas et quittant à tout moment la grand’route pour s’enfoncer dans les chemins de traverse. Il ne nous fait grâce de rien ; il éclaire en passant des points obscurs de géographie et d’histoire, relève des inscriptions, retrouve des villes perdues, détermine la direction des anciennes voies. Cette façon de procéder, qui était alors fort à la mode parmi les érudits, eut pour Chaupy un très grave inconvénient. Pendant qu’il s’attardait ainsi en chemin, on faillit lui enlever l’honneur de sa découverte. Un savant de Rome, de Sanctis, qui avait entendu parler de ses travaux, se mit sur la même piste, et, le gagnant de vitesse, ce qui n’était pas difficile, publia sur cette question une petite dissertation que le public accueillit favorablement. Ce fut un grand chagrin pour le pauvre abbé, qui s’en plaignit avec amertume. Heureusement ses trois volumes, qui furent bientôt en état de paraître, mirent l’opinion de son côté, et aujourd’hui on ne lui conteste guère la gloire, dont il était si fier, d’avoir découvert la maison de campagne d’Horace.

Voici en quelques mots comment il s’y prend pour démontrer aux plus incrédules qu’il ne s’est pas trompé. Il établit d’abord qu’Horace n’avait pas plusieurs domaines ; lui-même nous dit qu’il ne possède que le bien de la Sabine et que ce bien lui suffit : satis beatus unicis Sabinis. Il s’ensuit que toutes les descriptions qu’il a faites se rapportent à celui-là et doivent lui convenir. Ce principe établi, Chaupy visite successivement tous les endroits où l’on a voulu placer la maison du poète et n’a pas de peine à montrer qu’aucun ne répond tout à fait aux tableaux qu’il en a tracés. C’est seulement à l’est de Tivoli et dans les environs de Vicovaro qu’elle peut être ; ce lieu est le seul où tout s’accorde entièrement avec les vers d’Horace. Ce qui est plus frappant encore et achève de nous convaincre, c’est que les noms modernes y ont conservé leur apparence antique. Nous savons par Horace que la ville la plus voisine de sa maison et la plus importante, celle où ses métayers se rendaient tous les jours de marché, s’appelait Varia. La table de Peutinger mentionne aussi Varia et la place à 8 milles de Tibur ; or, à 8 milles de Tivoli, l’ancien Tibur, nous trouvons aujourd’hui Vicovaro, qui a gardé presque entièrement son ancienne dénomination (Vicus Varia), Au pied de Vicovaro coule un petit ruisseau qu’on appelle la Licenza : c’est, avec très peu de changemens, la Digentia d’Horace. Il nous dit que ce ruisseau arrose le petit bourg de Mandela ; aujourd’hui Mandela est devenu Bardela, ce qui est à peu près la même chose, et pour qu’aucun doute ne soit possible, une inscription qu’on y a trouvée lui restitue tout à fait son ancien nom. Enfin la haute montagne du Lucrétile, qui donnait de l’ombre à la maison du poète, est le Corgnaleto, qui s’appelait encore dans les chartes du moyen âge Mons Lucretii. Ce ne peut pas être le hasard qui a réuni dans le même endroit tous les noms de lieux mentionnés par le poète ; ce n’est pas le hasard non plus qui fait que ce canton de la Sabine est si parfaitement conforme à toutes ses descriptions. Il est donc certain que sa maison de campagne était placée dans cette plaine qu’arrose la Licenza, sur les rampes du Corgnaleto, non loin de Vicovaro et de Bardela. C’est là qu’il faut adresser les adorateurs d’Horace, — Dieu sait s’il en reste ! — quand ils veulent faire à sa villa un pieux pèlerinage.

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