Histoire de dix ans Tome III et IV

Fiction & Literature, Historical
Cover of the book Histoire de dix ans Tome III et IV by LOUIS BLANC, GILBERT TEROL
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Author: LOUIS BLANC ISBN: 1230001676853
Publisher: GILBERT TEROL Publication: May 12, 2017
Imprint: Language: French
Author: LOUIS BLANC
ISBN: 1230001676853
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: May 12, 2017
Imprint:
Language: French

Présentation de l’éditeur :

Ce livre comporte une table des matières dynamique, a été relue et corrigé.

Il est parfaitement mis en page pour une lecture sur liseuse électronique.

Extrait :

Le gouvernement français avait, au dehors, accompli son œuvre, et la France n’avait plus qu’à subir les péripéties du rôle obscur qui venait de lui être assigné dans le monde. Mais, par l’abaissement systématique de leur diplomatie, les ministres avaient préparé, à l’intérieur, les éléments d’une lutte terrible. D’ailleurs, la constitution, encore incomplète, avait à traverser les orages d’un débat public et chacun sentait que le plus sérieux embarras du gouvernement allait être de se constituer et de vivre.

Les légitimistes avaient mis toute une année à revenir de leur stupeur. Mais les incertitudes du pouvoir, ses faux ménagements, ses fureurs étourdies, les douleurs croissantes du peuple, et son mécontentement, exalté par l’orgueil d’une récente victoire, la France plus que jamais humiliée, l’Europe enfin rendue intraitable par l’excès même des concessions, tout semblait encourager le parti vaincu à ressaisir le gouvernement de la société, de nouveau livrée aux hasards. Ce parti était riche, d’ailleurs, et soutenu par les prêtres, sans parler de l’appui que promettaient à son audace les fanatiques du Midi, l’épée des gentilshommes de l’Ouest, et les paysans de la Vendée, race indomptable et fidèle.

Mais les légitimistes n’avaient pas de chefs.

M. de Chateaubriand était tombé dans un dégoût mortel des hommes et de son siècle. En proie à cette exaltation fébrile et à ce vide éternel du cœur, maladie des organisations d’élite, il en était venu à trouver pesant le fardeau de sa destinée, si enviée pourtant et si glorieuse. Il nous a été donné souvent de le voir dans cette dernière phase de sa vie, et nous avons été frappe, surtout, de ce qu’il y avait en lui de mélancolique et de souffrant. Son regard était d’une bienveillance amère. Il souriait avec peine et avait le sourire triste. Sa voix émue et profonde annonçait une âme troublée, et ses discours étaient pleins de découragement. Rien n’existait plus, en effet, de ce qui avait été pour lui un désir, an espoir ou une croyance ; et, après le grand naufrage auquel il avait survécu, il cherchait en vain dans ce qui n’avait pas encore succombé un aliment à son enthousiasme ou des inspirations pour son génie. La noblesse détruite, la monarchie abaissée, la religion flétrie, la liberté perdue, ne laissaient que désenchantement dans son existence de chevalier, de gentilhomme et de poète. Des spectacles éclatants, des affections illustres, ou, du moins, des inimitiés qui élèvent, voilà ce qu’il aurait fallu à ce cœur tourmenté ; et tout cela lui manquait. De tant de scène terribles ou héroïques auxquelles ou avait traîné, devant lui, le monde saisi d’étonnement et d’épouvante, que restait-il ? quelques souvenirs insultés. Il est des époques où l’orgueil des hommes forts trouve à se satisfaire au sein même de la souffrance, où l’on éprouve une sorte de joie frémissante à courir après le danger, où l’on peut enfin se consoler de la douleur par la haine. Pour M. de Chateaubriand, ces époques avaient été la Révolution et l’Empire. Mais, depuis, le siècle était devenu étroit et grossier ; de froides combinaisons y succédaient aux élans généreux ; les graves soucis du commandement s’y perdaient en un stérile tracas d’affaire ; les sympathies y étaient soumises au calcul, les répugnances condamnées à la fourberie ; et tout se trouvait à tel point rapetissé, qu’il n’y avait même plus moyen d’éprouver de ces haines dont on s’honore. Après la victoire remportée en juillet sur la monarchie et sur la noblesse, quel rôle pouvait être réservé à M. de Chateaubriand ? Celui d’homme de parti ? Il y était impropre, appartenant à cette classe de natures délicates, que rebutent les minces détails, qu’une activité banale fatigue, qui ne sont portées qu’aux grands sacrifices, ne consentent à combattre que les grands obstacles, et ne savent se résigner ni à employer des instruments vils, ni à ruser avec les passions humaines. Ce genre d’incapacité, les amis de M. de Chateaubriand le reconnaissaient en lui. Ses ennemis allaient plus loin, ils lui refusaient toutes les qualités de l’homme politique, et ils rappelaient quelles avaient été les manifestations de sa vie active : son faste et ses préoccupations littéraires dans l’exercice du pouvoir ; son indolence, un peu hautaine, au milieu des intrigues de cour ; les ambassades rêvées par lui comme autant de pieux pèlerinages ; son dédain pour les soins vulgaires ; son goût excessif pour les choses d’éclat ; ses prodigalités ; sa fortune même jetée au vent avec la philosophie d’un barde et la magnifique insouciance d’un grand-seigneur. Il est certain que M. de Chateaubriand aurait envisagé volontiers le commandement par son coté poétique. Il aurait voulu monter au faite de la société, pour y jouir d’une perspective plus étendue et plus lumineuse, pour y charmer les hommes en associant à leurs agitations les efforts de sa pensée, pour y composer, en quelque sorte, de vivants poëmes. Eh qu’importe ? Ceux-là seuls agissent fortement sur les peuples, qui portent en eux de quoi s’élever au-dessus dés pensées vulgaires. Napoléon ne l’ignorait pas.

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Présentation de l’éditeur :

Ce livre comporte une table des matières dynamique, a été relue et corrigé.

Il est parfaitement mis en page pour une lecture sur liseuse électronique.

Extrait :

Le gouvernement français avait, au dehors, accompli son œuvre, et la France n’avait plus qu’à subir les péripéties du rôle obscur qui venait de lui être assigné dans le monde. Mais, par l’abaissement systématique de leur diplomatie, les ministres avaient préparé, à l’intérieur, les éléments d’une lutte terrible. D’ailleurs, la constitution, encore incomplète, avait à traverser les orages d’un débat public et chacun sentait que le plus sérieux embarras du gouvernement allait être de se constituer et de vivre.

Les légitimistes avaient mis toute une année à revenir de leur stupeur. Mais les incertitudes du pouvoir, ses faux ménagements, ses fureurs étourdies, les douleurs croissantes du peuple, et son mécontentement, exalté par l’orgueil d’une récente victoire, la France plus que jamais humiliée, l’Europe enfin rendue intraitable par l’excès même des concessions, tout semblait encourager le parti vaincu à ressaisir le gouvernement de la société, de nouveau livrée aux hasards. Ce parti était riche, d’ailleurs, et soutenu par les prêtres, sans parler de l’appui que promettaient à son audace les fanatiques du Midi, l’épée des gentilshommes de l’Ouest, et les paysans de la Vendée, race indomptable et fidèle.

Mais les légitimistes n’avaient pas de chefs.

M. de Chateaubriand était tombé dans un dégoût mortel des hommes et de son siècle. En proie à cette exaltation fébrile et à ce vide éternel du cœur, maladie des organisations d’élite, il en était venu à trouver pesant le fardeau de sa destinée, si enviée pourtant et si glorieuse. Il nous a été donné souvent de le voir dans cette dernière phase de sa vie, et nous avons été frappe, surtout, de ce qu’il y avait en lui de mélancolique et de souffrant. Son regard était d’une bienveillance amère. Il souriait avec peine et avait le sourire triste. Sa voix émue et profonde annonçait une âme troublée, et ses discours étaient pleins de découragement. Rien n’existait plus, en effet, de ce qui avait été pour lui un désir, an espoir ou une croyance ; et, après le grand naufrage auquel il avait survécu, il cherchait en vain dans ce qui n’avait pas encore succombé un aliment à son enthousiasme ou des inspirations pour son génie. La noblesse détruite, la monarchie abaissée, la religion flétrie, la liberté perdue, ne laissaient que désenchantement dans son existence de chevalier, de gentilhomme et de poète. Des spectacles éclatants, des affections illustres, ou, du moins, des inimitiés qui élèvent, voilà ce qu’il aurait fallu à ce cœur tourmenté ; et tout cela lui manquait. De tant de scène terribles ou héroïques auxquelles ou avait traîné, devant lui, le monde saisi d’étonnement et d’épouvante, que restait-il ? quelques souvenirs insultés. Il est des époques où l’orgueil des hommes forts trouve à se satisfaire au sein même de la souffrance, où l’on éprouve une sorte de joie frémissante à courir après le danger, où l’on peut enfin se consoler de la douleur par la haine. Pour M. de Chateaubriand, ces époques avaient été la Révolution et l’Empire. Mais, depuis, le siècle était devenu étroit et grossier ; de froides combinaisons y succédaient aux élans généreux ; les graves soucis du commandement s’y perdaient en un stérile tracas d’affaire ; les sympathies y étaient soumises au calcul, les répugnances condamnées à la fourberie ; et tout se trouvait à tel point rapetissé, qu’il n’y avait même plus moyen d’éprouver de ces haines dont on s’honore. Après la victoire remportée en juillet sur la monarchie et sur la noblesse, quel rôle pouvait être réservé à M. de Chateaubriand ? Celui d’homme de parti ? Il y était impropre, appartenant à cette classe de natures délicates, que rebutent les minces détails, qu’une activité banale fatigue, qui ne sont portées qu’aux grands sacrifices, ne consentent à combattre que les grands obstacles, et ne savent se résigner ni à employer des instruments vils, ni à ruser avec les passions humaines. Ce genre d’incapacité, les amis de M. de Chateaubriand le reconnaissaient en lui. Ses ennemis allaient plus loin, ils lui refusaient toutes les qualités de l’homme politique, et ils rappelaient quelles avaient été les manifestations de sa vie active : son faste et ses préoccupations littéraires dans l’exercice du pouvoir ; son indolence, un peu hautaine, au milieu des intrigues de cour ; les ambassades rêvées par lui comme autant de pieux pèlerinages ; son dédain pour les soins vulgaires ; son goût excessif pour les choses d’éclat ; ses prodigalités ; sa fortune même jetée au vent avec la philosophie d’un barde et la magnifique insouciance d’un grand-seigneur. Il est certain que M. de Chateaubriand aurait envisagé volontiers le commandement par son coté poétique. Il aurait voulu monter au faite de la société, pour y jouir d’une perspective plus étendue et plus lumineuse, pour y charmer les hommes en associant à leurs agitations les efforts de sa pensée, pour y composer, en quelque sorte, de vivants poëmes. Eh qu’importe ? Ceux-là seuls agissent fortement sur les peuples, qui portent en eux de quoi s’élever au-dessus dés pensées vulgaires. Napoléon ne l’ignorait pas.

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