DISCOUR PRONONCE A L'INAUGURATION

Fiction & Literature, Historical
Cover of the book DISCOUR PRONONCE A L'INAUGURATION by ANATOLE FRANCE, GILBERT TEROL
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Author: ANATOLE FRANCE ISBN: 1230000211820
Publisher: GILBERT TEROL Publication: January 22, 2014
Imprint: Language: French
Author: ANATOLE FRANCE
ISBN: 1230000211820
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: January 22, 2014
Imprint:
Language: French

MESDAMES ET MESSIEURS,

Je sens vivement l’honneur qui m’est échu de porter à la mémoire d’Ernest Renan l’hommage des Bleus de Bretagne et de parler, dans ces fêtes de l’intelligence, après l’homme illustre que vous venez d’applaudir. Berthelot, Renan  ! J’unis vos deux noms, pour les honorer l’un par l’autre. Hommes admirables qui, situés sur les deux extrémités des sciences, en avez reculé les frontières. Tandis que Renan, avec une perspicacité sans égale et un rare courage intellectuel, appliquait au langage et aux religions la critique historique, vous Berthelot, par des expériences innombrables, toujours délicates et souvent périlleuses, vous établissiez l’unité des lois qui régissent la matière, et vous rameniez les énergies chimiques aux conditions de la mécanique rationnelle. Ainsi tous deux, portant la lumière dans des régions inconnues, vous avez gagné à la raison humaine, sur les larves et les fantômes, un immense territoire.

Cette réflexion, messieurs, m’a mis au cœur de mon sujet. Renan avait l’esprit fait pour sentir très vite la difficulté de croire. Tout jeune, au séminaire, il esquissa dans son esprit une philosophie des sciences. Il n’avait pas entendu parler de Lamarck, ni de Geoffroy Saint-Hilaire. Darwin n’avait pas encore publié son livre sur l’Origine des espèces. Écartant, comme enfantine et fabuleuse, l’idée de la création telle qu’elle est exposée dans les vieilles cosmogonies, sans initiateur et sans guide, il conçut une théorie du transformisme universel, une doctrine de la perpétuelle évolution des êtres et des métamorphoses de la nature. Ses croyances fondamentales étaient dès lors établies. En réalité, Renan, dans le cours de sa vie, changea peu. Ceux qui le croyaient flottant et mobile n’avaient pas pris la peine d’observer son monde de pensées. Il ressemblait à sa terre natale, les nuées y couraient dans un ciel agité, mais le sol en était de granit, et des chênes y plongeaient leurs racines. À vingt-six ans, après cette révolution de Février, source pour lui de grandes espérances, de grandes illusions, il exposa toute sa philosophie dans ce livre de l’Avenir de la science, que plus tard il appelait son vieux Pourânas, entendant par là que c’était le recueil de ses jeunes et chères croyances, les premières incarnations de ses dieux bons. À cela près que le livre est un peu plus optimiste que de raison et n’a pas cette douceur de la maturité, on y trouve Renan tout entier, Renan dévoué à la science, attendant le règne de la science et le salut du monde par la science.

Ses premières contributions à la linguistique et à la critique furent un Essai sur l’origine du langage, une étude sur Averroès et la philosophie arabe au moyen âge, et l’Histoire générale des langues sémitiques dont l’esquisse date de 1847.

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MESDAMES ET MESSIEURS,

Je sens vivement l’honneur qui m’est échu de porter à la mémoire d’Ernest Renan l’hommage des Bleus de Bretagne et de parler, dans ces fêtes de l’intelligence, après l’homme illustre que vous venez d’applaudir. Berthelot, Renan  ! J’unis vos deux noms, pour les honorer l’un par l’autre. Hommes admirables qui, situés sur les deux extrémités des sciences, en avez reculé les frontières. Tandis que Renan, avec une perspicacité sans égale et un rare courage intellectuel, appliquait au langage et aux religions la critique historique, vous Berthelot, par des expériences innombrables, toujours délicates et souvent périlleuses, vous établissiez l’unité des lois qui régissent la matière, et vous rameniez les énergies chimiques aux conditions de la mécanique rationnelle. Ainsi tous deux, portant la lumière dans des régions inconnues, vous avez gagné à la raison humaine, sur les larves et les fantômes, un immense territoire.

Cette réflexion, messieurs, m’a mis au cœur de mon sujet. Renan avait l’esprit fait pour sentir très vite la difficulté de croire. Tout jeune, au séminaire, il esquissa dans son esprit une philosophie des sciences. Il n’avait pas entendu parler de Lamarck, ni de Geoffroy Saint-Hilaire. Darwin n’avait pas encore publié son livre sur l’Origine des espèces. Écartant, comme enfantine et fabuleuse, l’idée de la création telle qu’elle est exposée dans les vieilles cosmogonies, sans initiateur et sans guide, il conçut une théorie du transformisme universel, une doctrine de la perpétuelle évolution des êtres et des métamorphoses de la nature. Ses croyances fondamentales étaient dès lors établies. En réalité, Renan, dans le cours de sa vie, changea peu. Ceux qui le croyaient flottant et mobile n’avaient pas pris la peine d’observer son monde de pensées. Il ressemblait à sa terre natale, les nuées y couraient dans un ciel agité, mais le sol en était de granit, et des chênes y plongeaient leurs racines. À vingt-six ans, après cette révolution de Février, source pour lui de grandes espérances, de grandes illusions, il exposa toute sa philosophie dans ce livre de l’Avenir de la science, que plus tard il appelait son vieux Pourânas, entendant par là que c’était le recueil de ses jeunes et chères croyances, les premières incarnations de ses dieux bons. À cela près que le livre est un peu plus optimiste que de raison et n’a pas cette douceur de la maturité, on y trouve Renan tout entier, Renan dévoué à la science, attendant le règne de la science et le salut du monde par la science.

Ses premières contributions à la linguistique et à la critique furent un Essai sur l’origine du langage, une étude sur Averroès et la philosophie arabe au moyen âge, et l’Histoire générale des langues sémitiques dont l’esquisse date de 1847.

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