La Forêt des Aventures

Fiction & Literature, Literary
Cover of the book La Forêt des Aventures by MAURICE LEBLANC, ANDRÉ DE MARICOURT, GILBERT TEROL
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Author: MAURICE LEBLANC, ANDRÉ DE MARICOURT ISBN: 1230001232486
Publisher: GILBERT TEROL Publication: July 17, 2016
Imprint: Language: French
Author: MAURICE LEBLANC, ANDRÉ DE MARICOURT
ISBN: 1230001232486
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: July 17, 2016
Imprint:
Language: French

Extrait :

Contre la fenêtre, à l’extrémité du grand salon, il y avait une table sur cette table un fauteuil, sur ce fauteuil un tabouret, et sur ce tabouret un petit garçon qui, à l’aide d’un caillou serti dans une bague de plomb, faisait mine de couper l’une des vitres supérieures.

Tout cela formait une pyramide miraculeuse, mais un peu branlante. Si branlante même que, par suite de la défaillance du tabouret, le petit garçon n’eut que le temps de s’accrocher à l’un des rideaux de damas cerise, tandis que s’écroulait avec fracas l’édifice péniblement construit.

À l’autre extrémité du salon, dans une partie lointaine qui formait boudoir, une jeune femme laissa échapper un cri d’effroi :

Mme Boisgarnier souleva son corps émacié qui disparaissait sur un sofa, au milieu d’un amoncellement de coussins et de cachemires :

— Qu’y a-t-il donc, Pierre ? dit-elle à l’enfant, qui glissait le long du rideau. Que fais-tu là ?

— Rien... rien... maman... Ne vous inquiétez pas, je joue...

— À quoi ? À te casser une jambe ?

— Mais non, maman, aux évasions de Latude, le prisonnier de la Bastille. Je m’enfuyais par le carreau quand cette maudite chaise...

— Reste tranquille, Pierre, tu me fatigues. Tu entends ? Je te prie de ne plus bouger.

Latude ne bougea plus. D’ailleurs, ayant « manqué » son évasion, il était tout naturel que Latude se reposât et réfléchît. Paisiblement, l’enfant assis réfléchit donc. Comment se sauver, et se sauver sans faire de bruit ?

Devant lui s’étendait un large espace de parquet, luisant comme de l’eau, dont les lames entrecroisées semblaient à l’imaginaire petit garçon des vagues immobiles. Et là, tout à côté, un autre tabouret appuyait sur le sol ses quatre pieds de bois munis de roulettes.

Quelle tentation !

Bien entendu, Pierre y succomba tout de suite. Se couchant à plat ventre sur le tabouret, il se mit à nager dans la mer immense. À ses propres yeux, il n’était plus Latude, mais il jouait un autre personnage : un naufragé qui se cramponnait à son épave et subissait l’assaut des océans déchaînés dans une terrible lutte.

— Oh ! quelle vague ! disait-il entre ses dents. Une montagne d’eau ! Je suis perdu... Non, sauvé, mon Dieu !... Mais combien de périls encore... Les requins !... Et cette pieuvre là-bas, cette pieuvre monstrueuse !... Elle vient vers moi... Ses tentacules m’enveloppent... Elle s’abreuve de mon sang... Ah ! mourir à mon âge !... Non, mille fois non... Un suprême effort... Hourra j’ai mon couteau suisse à quatre lames ! Tiens, bête ignoble... Tu ne m’empêcheras plus d’aborder. Voici une île déserte...

L’épave qu’était devenu pour lui l’infortuné tabouret échoua sur une plage de sable fin. Le naufragé grimpa le long des roches qui soutenaient le plateau central. C’était le salut. Il brandit un drapeau multicolore et s’écria :

— Vive la France !

Ce cri retentissant, dans le silence ouaté de la pièce, perdit l’enfant. Mme Boisgarnier tourna la tête et, soulevée d’inquiétude, elle apostropha le « navigateur ».

— Pierre ! Mais c’est abominable ! Voilà que tu montes sur le sofa avec tes bottines !

— Oh ! maman, pas du tout, je suis pieds nus.

— Qu’est-ce que tu chantes ?

— Oui, maman, je joue à Robinson Crusoé. Alors, n’est-ce pas ? J’ai ôté mes bottines pour mieux nager.

— Mais ce coussin que tu agites ?

— C’est pas un coussin, maman; vous n’y voyez donc pas ? C’est un drapeau tricolore.

La pauvre mère se lamenta :

— Que de balivernes, mon petit Pierre ! Tu sais cependant bien qu’il n’y a pas là de drapeau, ni rien qui rappelle une île déserte !

— Non, mais je fais comme si...

Mme Boisgarnier ne put s’empêcher de sourire.

— Eh bien, mon chéri, puisque tu aimes ta maman, fais donc comme si tu jouais au silence et au calme.

Pourquoi pas, après tout ? Accroupi au bord de son île déserte, Pierre n’ignorait pas que la vie est pleine de belles aventures. Une est perdue, dix sont retrouvées. Et même, quand on ferme à moitié les yeux, mille rêves se croisent, dansent, voltigent, et tournoient dans le mirage d’un décor merveilleux.

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Extrait :

Contre la fenêtre, à l’extrémité du grand salon, il y avait une table sur cette table un fauteuil, sur ce fauteuil un tabouret, et sur ce tabouret un petit garçon qui, à l’aide d’un caillou serti dans une bague de plomb, faisait mine de couper l’une des vitres supérieures.

Tout cela formait une pyramide miraculeuse, mais un peu branlante. Si branlante même que, par suite de la défaillance du tabouret, le petit garçon n’eut que le temps de s’accrocher à l’un des rideaux de damas cerise, tandis que s’écroulait avec fracas l’édifice péniblement construit.

À l’autre extrémité du salon, dans une partie lointaine qui formait boudoir, une jeune femme laissa échapper un cri d’effroi :

Mme Boisgarnier souleva son corps émacié qui disparaissait sur un sofa, au milieu d’un amoncellement de coussins et de cachemires :

— Qu’y a-t-il donc, Pierre ? dit-elle à l’enfant, qui glissait le long du rideau. Que fais-tu là ?

— Rien... rien... maman... Ne vous inquiétez pas, je joue...

— À quoi ? À te casser une jambe ?

— Mais non, maman, aux évasions de Latude, le prisonnier de la Bastille. Je m’enfuyais par le carreau quand cette maudite chaise...

— Reste tranquille, Pierre, tu me fatigues. Tu entends ? Je te prie de ne plus bouger.

Latude ne bougea plus. D’ailleurs, ayant « manqué » son évasion, il était tout naturel que Latude se reposât et réfléchît. Paisiblement, l’enfant assis réfléchit donc. Comment se sauver, et se sauver sans faire de bruit ?

Devant lui s’étendait un large espace de parquet, luisant comme de l’eau, dont les lames entrecroisées semblaient à l’imaginaire petit garçon des vagues immobiles. Et là, tout à côté, un autre tabouret appuyait sur le sol ses quatre pieds de bois munis de roulettes.

Quelle tentation !

Bien entendu, Pierre y succomba tout de suite. Se couchant à plat ventre sur le tabouret, il se mit à nager dans la mer immense. À ses propres yeux, il n’était plus Latude, mais il jouait un autre personnage : un naufragé qui se cramponnait à son épave et subissait l’assaut des océans déchaînés dans une terrible lutte.

— Oh ! quelle vague ! disait-il entre ses dents. Une montagne d’eau ! Je suis perdu... Non, sauvé, mon Dieu !... Mais combien de périls encore... Les requins !... Et cette pieuvre là-bas, cette pieuvre monstrueuse !... Elle vient vers moi... Ses tentacules m’enveloppent... Elle s’abreuve de mon sang... Ah ! mourir à mon âge !... Non, mille fois non... Un suprême effort... Hourra j’ai mon couteau suisse à quatre lames ! Tiens, bête ignoble... Tu ne m’empêcheras plus d’aborder. Voici une île déserte...

L’épave qu’était devenu pour lui l’infortuné tabouret échoua sur une plage de sable fin. Le naufragé grimpa le long des roches qui soutenaient le plateau central. C’était le salut. Il brandit un drapeau multicolore et s’écria :

— Vive la France !

Ce cri retentissant, dans le silence ouaté de la pièce, perdit l’enfant. Mme Boisgarnier tourna la tête et, soulevée d’inquiétude, elle apostropha le « navigateur ».

— Pierre ! Mais c’est abominable ! Voilà que tu montes sur le sofa avec tes bottines !

— Oh ! maman, pas du tout, je suis pieds nus.

— Qu’est-ce que tu chantes ?

— Oui, maman, je joue à Robinson Crusoé. Alors, n’est-ce pas ? J’ai ôté mes bottines pour mieux nager.

— Mais ce coussin que tu agites ?

— C’est pas un coussin, maman; vous n’y voyez donc pas ? C’est un drapeau tricolore.

La pauvre mère se lamenta :

— Que de balivernes, mon petit Pierre ! Tu sais cependant bien qu’il n’y a pas là de drapeau, ni rien qui rappelle une île déserte !

— Non, mais je fais comme si...

Mme Boisgarnier ne put s’empêcher de sourire.

— Eh bien, mon chéri, puisque tu aimes ta maman, fais donc comme si tu jouais au silence et au calme.

Pourquoi pas, après tout ? Accroupi au bord de son île déserte, Pierre n’ignorait pas que la vie est pleine de belles aventures. Une est perdue, dix sont retrouvées. Et même, quand on ferme à moitié les yeux, mille rêves se croisent, dansent, voltigent, et tournoient dans le mirage d’un décor merveilleux.

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