Author: | Fiodor Dostoievski | ISBN: | 1230000700887 |
Publisher: | pb | Publication: | October 4, 2015 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Fiodor Dostoievski |
ISBN: | 1230000700887 |
Publisher: | pb |
Publication: | October 4, 2015 |
Imprint: | |
Language: | French |
Vous comprenez maintenant, lecteur, comment je connais tout Pétersbourg.
Je vous ai déjà dit les trois journées d’inquiétude que je passai à chercher
les causes du singulier état d’esprit où je me trouvais. Je ne me sentais
bien nulle part, ni dans la rue ni chez moi. ?e me manque-t-il donc ?
pensais-je, pourquoi suis-je si mal à l’aise ? Et je m’étonnais de remarquer,
pour la première fois, la laideur de mes murs enfumés et du plafond où
Matrena cultivait des toiles d’araignées avec grand succès. J’examinais
mon mobilier, meuble par meuble, me demandant devant chacun : N’estce
pas là qu’est le malheur ? (Car, en temps normal, il suffisait qu’une
chaise fût placée autrement que la veille pour que je fusse hors de moi.)
Puis je regardais par la fenêtre… Rien, nulle nouvelle cause d’ennui. J’imaginai
d’appeler Matrena et de lui faire des reproches paternels au sujet de
sa saleté en général et des toiles d’araignées en particulier ; mais elle me
regarda avec stupéfaction et c’est tout ce que j’obtins d’elle ; elle sortit
de la chambre sans me répondre un seul mot. Et les toiles d’araignées ne
disparaîtront jamais.
C’est ce matin seulement que j’ai compris de quoi il s’agissait : hé !
hé ! mais… ils ont tous fichu le camp à la campagne !… (Passez-moi ce
mot trivial, je ne suis pas en train de faire du grand style.) Oui, tout Pétersbourg
est à la campagne… Et aussitôt chaque gentleman honorable, je
veux dire d’extérieur comme il faut, qui passait en fiacre, se transformait
à mes yeux en un estimable père de famille qui, après ses occupations ordinaires,
s’en allait légèrement dans sa maison familiale, à la campagne.
Tous les passants, depuis trois jours, avaient changé d’allure et tout en
eux disait clairement : Nous ne sommes ici qu’en passant, et dans deux
heures nous serons partis.
Vous comprenez maintenant, lecteur, comment je connais tout Pétersbourg.
Je vous ai déjà dit les trois journées d’inquiétude que je passai à chercher
les causes du singulier état d’esprit où je me trouvais. Je ne me sentais
bien nulle part, ni dans la rue ni chez moi. ?e me manque-t-il donc ?
pensais-je, pourquoi suis-je si mal à l’aise ? Et je m’étonnais de remarquer,
pour la première fois, la laideur de mes murs enfumés et du plafond où
Matrena cultivait des toiles d’araignées avec grand succès. J’examinais
mon mobilier, meuble par meuble, me demandant devant chacun : N’estce
pas là qu’est le malheur ? (Car, en temps normal, il suffisait qu’une
chaise fût placée autrement que la veille pour que je fusse hors de moi.)
Puis je regardais par la fenêtre… Rien, nulle nouvelle cause d’ennui. J’imaginai
d’appeler Matrena et de lui faire des reproches paternels au sujet de
sa saleté en général et des toiles d’araignées en particulier ; mais elle me
regarda avec stupéfaction et c’est tout ce que j’obtins d’elle ; elle sortit
de la chambre sans me répondre un seul mot. Et les toiles d’araignées ne
disparaîtront jamais.
C’est ce matin seulement que j’ai compris de quoi il s’agissait : hé !
hé ! mais… ils ont tous fichu le camp à la campagne !… (Passez-moi ce
mot trivial, je ne suis pas en train de faire du grand style.) Oui, tout Pétersbourg
est à la campagne… Et aussitôt chaque gentleman honorable, je
veux dire d’extérieur comme il faut, qui passait en fiacre, se transformait
à mes yeux en un estimable père de famille qui, après ses occupations ordinaires,
s’en allait légèrement dans sa maison familiale, à la campagne.
Tous les passants, depuis trois jours, avaient changé d’allure et tout en
eux disait clairement : Nous ne sommes ici qu’en passant, et dans deux
heures nous serons partis.