Author: | PIERRE HARTEX | ISBN: | 1230001111187 |
Publisher: | GILBERT TEROL | Publication: | May 12, 2016 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | PIERRE HARTEX |
ISBN: | 1230001111187 |
Publisher: | GILBERT TEROL |
Publication: | May 12, 2016 |
Imprint: | |
Language: | French |
Extrait :
Le Triton, navire qui fait la croisière des Mille-Iles, avait quitté Montréal depuis deux jours.
Deux cents personnes, de tout âge, sexe, catégorie sociale et fortune, encombraient ses ponts, désireuses de jouir du grand air, du bercement du bateau et de la vue du paysage, droit qu’elles avaient acquis moyennant une somme rondelette. Elles se préoccupaient surtout d’emmagasiner le plus d’impressions possible, afin d’épater les amis, au retour, par des récits mirifiques. Elles parleraient longtemps de ce voyage qui les relevait à leurs propres yeux et les mettait au-dessus du vulgaire. Comme il serait agréable, les années suivantes, de commencer une anecdote en jetant d’un air faussement négligé : « Quand j’ai fait le tour des Mille-Îles… »
La société bourgeoise de Montréal se divise en plusieurs classes.
l° Il y a d’abord ceux qui restent à Montréal tout l’été. Ce sont ceux que l’on dit absolument dénués d’éducation ! Ils ont peut-être une automobile dans laquelle ils font des fugues à la campagne, le dimanche. Alors, ils ont droit à quelque considération, à condition que le prix d’achat de leur voiture s’écrive, au moins, avec quatre chiffres et cette considération est en proportion de l’importance de ladite somme.
2° Il y a ensuite ceux qui, en semant la perturbation dans leur budget, vont se terrer dans une campagne peu fréquentée. Ces gens sont « quelqu’un ». Ils commencent à se détacher de la masse.
3° On rencontre aussi les personnes qui ont un cottage, sur les rives du lac Saint-Louis. Elles affrontent héroïquement le pullulement de ces endroits et la poussière soulevée par les innombrables automobiles appartenant aux bourgeois de la première catégorie, afin de maintenir leur prestige. Ce courage, vraiment grand, leur vaut une somme considérable d’estime et les place immédiatement au-dessous des précédents.
4° Ceux qui font partie de clubs de golf et s’ennuient mortellement à ce sport qu’il est convenu d’appeler chic. Et, en effet, ce sont des chics, catégorie qui se subdivise en plusieurs groupes, tous nettement supérieurs aux trois premières catégories.
Ces groupes chics, nous n’allons pas les énumérer. Ils sont légion, allant des habitués des plages du Maine, (les femmes de ce groupe vous disent, quelques jours avant Pâques : « Ma chère ! impossible de s’habiller décemment à Montréal. Il faut que j’aille à New-York » ), à ceux qui font une croisière autour du monde avec une agence quelconque, en passant par ceux qui se contentent d’aller voir les Rocheuses, la Gaspésie, le Saguenay et les Mille-Îles.
Extrait :
Le Triton, navire qui fait la croisière des Mille-Iles, avait quitté Montréal depuis deux jours.
Deux cents personnes, de tout âge, sexe, catégorie sociale et fortune, encombraient ses ponts, désireuses de jouir du grand air, du bercement du bateau et de la vue du paysage, droit qu’elles avaient acquis moyennant une somme rondelette. Elles se préoccupaient surtout d’emmagasiner le plus d’impressions possible, afin d’épater les amis, au retour, par des récits mirifiques. Elles parleraient longtemps de ce voyage qui les relevait à leurs propres yeux et les mettait au-dessus du vulgaire. Comme il serait agréable, les années suivantes, de commencer une anecdote en jetant d’un air faussement négligé : « Quand j’ai fait le tour des Mille-Îles… »
La société bourgeoise de Montréal se divise en plusieurs classes.
l° Il y a d’abord ceux qui restent à Montréal tout l’été. Ce sont ceux que l’on dit absolument dénués d’éducation ! Ils ont peut-être une automobile dans laquelle ils font des fugues à la campagne, le dimanche. Alors, ils ont droit à quelque considération, à condition que le prix d’achat de leur voiture s’écrive, au moins, avec quatre chiffres et cette considération est en proportion de l’importance de ladite somme.
2° Il y a ensuite ceux qui, en semant la perturbation dans leur budget, vont se terrer dans une campagne peu fréquentée. Ces gens sont « quelqu’un ». Ils commencent à se détacher de la masse.
3° On rencontre aussi les personnes qui ont un cottage, sur les rives du lac Saint-Louis. Elles affrontent héroïquement le pullulement de ces endroits et la poussière soulevée par les innombrables automobiles appartenant aux bourgeois de la première catégorie, afin de maintenir leur prestige. Ce courage, vraiment grand, leur vaut une somme considérable d’estime et les place immédiatement au-dessous des précédents.
4° Ceux qui font partie de clubs de golf et s’ennuient mortellement à ce sport qu’il est convenu d’appeler chic. Et, en effet, ce sont des chics, catégorie qui se subdivise en plusieurs groupes, tous nettement supérieurs aux trois premières catégories.
Ces groupes chics, nous n’allons pas les énumérer. Ils sont légion, allant des habitués des plages du Maine, (les femmes de ce groupe vous disent, quelques jours avant Pâques : « Ma chère ! impossible de s’habiller décemment à Montréal. Il faut que j’aille à New-York » ), à ceux qui font une croisière autour du monde avec une agence quelconque, en passant par ceux qui se contentent d’aller voir les Rocheuses, la Gaspésie, le Saguenay et les Mille-Îles.