Le chef des Hurons

Fiction & Literature, Classics, Historical
Cover of the book Le chef des Hurons by LÉON VILLE, GILBERT TEROL
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Author: LÉON VILLE ISBN: 1230002774732
Publisher: GILBERT TEROL Publication: November 1, 2018
Imprint: Language: French
Author: LÉON VILLE
ISBN: 1230002774732
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: November 1, 2018
Imprint:
Language: French

Le fleuve Saint-Laurent, appelé primitivement, par les indigènes, Hochelega, fut remonté pour la première fois par Jacques Cartier, qui lui donna le nom qu’il porte aujourd’hui.

Ce fleuve majestueux peut être considéré comme la continuation d’un immense cours d’eau qui part de la petite rivière de Saint-Louis pour aller se jeter dans l’Océan Atlantique, en passant à travers les quatre grands lacs ; il est vrai qu’il change de nom plusieurs fois, selon la région qu’il traverse ; depuis son embouchure dans le golfe Saint-Laurent, où il se jette par 46°, 52° de latitude N. ; 59°, 60° de longitude O., jusqu’à Montréal, il se nomme Saint-Laurent ; de ce point au lac Ontario ou Frontenac, Cat-ahri-kui ou rivière des Iroquois ; Niagara entre l’Ontario et l’Érié ; et enfin rivière du Détroit entre l’Érié et le lac Saint-Clair.

Au-dessus de Montréal, des rapides rendent toute navigation impossible ; seules de légères pirogues, conduites par des pilotes indigènes, peuvent se risquer dans ces parages dangereux.

Quel que soit l’endroit de ce fleuve où l’on se place, on jouit de la plus admirable perspective qui se puisse voir ; mais un des sites les plus magnifiques est sans contredit le goulet formé à quelques lieues de Québec par le lac Brûlé et le cap Tourments, à l’endroit où les eaux denses du Saint-Laurent se rencontrent avec les eaux salées du golfe.

Ce passage, redouté des marins, est hérissé de roches qui rendent la navigation extrêmement périlleuse, et encore ne s’y risquent-ils qu’à la marée haute, car, étant donné le peu de profondeur du fleuve à cet endroit, les plus petits navires n’oseraient passer dans le goulet à la marée basse, même en se servant de la sonde.

Le jour où commence cette histoire, c’est-à-dire le 30 juin 1756, vers cinq heures du soir, un homme se tenait debout, à une portée de fusil du cap Tourments ; les mains croisées sur le haut du canon de sa carabine, les yeux fixés sur le sol, il semblait réfléchir profondément.

Cet homme paraissait âgé de vingt-cinq ans environ ; sa taille haute et bien prise dénotait une force musculaire peu commune ; son visage, bronzé par le soleil et les intempéries, et éclairé par des yeux d’un bleu sombre, était orné d’une courte barbe blonde, et une épaisse chevelure rousse s’échappait de son bonnet de peau de castor. Son costume, fait de peaux de daim, était celui des chasseurs canadiens.

Louis Martel, ainsi qu’il se nommait, était né de parents normands fixés au Canada depuis une trentaine d’années. Dès l’âge de seize ans il avait été séduit par la rude vie des coureurs des bois. Cette existence, si pleine de périls de toutes sortes, plaisait à son caractère énergique et aventureux ; aussi n’avait-il pas tardé à jouir, au désert, d’une réputation d’intrépidité qui lui avait valu le surnom de Sans-Peur, sous lequel nous le désignerons désormais.

Sa présence à l’endroit où nous le présentons au lecteur prouve suffisamment qu’il était digne du nom glorieux que lui avaient donné les Indiens et les coureurs des bois. En effet, à cette époque la France soutenait désespérément une lutte inégale contre l’Angleterre, qui dépensait sans compter les hommes et les millions pour nous arracher le Canada, objet de ses plus ardentes convoitises. Pour s’aventurer ainsi seul dans ces solitudes, il fallait que Sans-Peur fût réellement doué d’un courage à toute épreuve, car les Iroquois, alliés aux Anglais comme les Hurons l’étaient aux Français parcouraient sans cesse les forêts, tuant et pillant, non pour être agréables à ceux qui les employaient, mais afin de satisfaire leur cupidité et leur rage sanguinaire. Les Anglais eux-mêmes redoutaient leurs farouches alliés.

Sans-Peur était depuis une heure absorbé par ses pensées, quand un bruit vague lui fit dresser l’oreille.

Il se pencha en avant en écoutant attentivement.

— Ah ! ah ! fit-il soudain, qu’est-ce que cela ?

Et, d’un bond, il fut abrité derrière un rocher, le doigt sur la gâchette de son fusil.

Le bruit se rapprochait de plus en plus, et le Canadien distingua bientôt les pas précipités de plusieurs hommes.

Tout à coup, un Indien passa comme une flèche à travers un fourré et s’embusqua derrière un rocher, à dix pas à peine du chasseur, qui avait du premier coup d’œil reconnu un guerrier huron.

— Bon ! pensa Sans-Peur, il est poursuivi par des Iroquois ; nous allons rire.

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Le fleuve Saint-Laurent, appelé primitivement, par les indigènes, Hochelega, fut remonté pour la première fois par Jacques Cartier, qui lui donna le nom qu’il porte aujourd’hui.

Ce fleuve majestueux peut être considéré comme la continuation d’un immense cours d’eau qui part de la petite rivière de Saint-Louis pour aller se jeter dans l’Océan Atlantique, en passant à travers les quatre grands lacs ; il est vrai qu’il change de nom plusieurs fois, selon la région qu’il traverse ; depuis son embouchure dans le golfe Saint-Laurent, où il se jette par 46°, 52° de latitude N. ; 59°, 60° de longitude O., jusqu’à Montréal, il se nomme Saint-Laurent ; de ce point au lac Ontario ou Frontenac, Cat-ahri-kui ou rivière des Iroquois ; Niagara entre l’Ontario et l’Érié ; et enfin rivière du Détroit entre l’Érié et le lac Saint-Clair.

Au-dessus de Montréal, des rapides rendent toute navigation impossible ; seules de légères pirogues, conduites par des pilotes indigènes, peuvent se risquer dans ces parages dangereux.

Quel que soit l’endroit de ce fleuve où l’on se place, on jouit de la plus admirable perspective qui se puisse voir ; mais un des sites les plus magnifiques est sans contredit le goulet formé à quelques lieues de Québec par le lac Brûlé et le cap Tourments, à l’endroit où les eaux denses du Saint-Laurent se rencontrent avec les eaux salées du golfe.

Ce passage, redouté des marins, est hérissé de roches qui rendent la navigation extrêmement périlleuse, et encore ne s’y risquent-ils qu’à la marée haute, car, étant donné le peu de profondeur du fleuve à cet endroit, les plus petits navires n’oseraient passer dans le goulet à la marée basse, même en se servant de la sonde.

Le jour où commence cette histoire, c’est-à-dire le 30 juin 1756, vers cinq heures du soir, un homme se tenait debout, à une portée de fusil du cap Tourments ; les mains croisées sur le haut du canon de sa carabine, les yeux fixés sur le sol, il semblait réfléchir profondément.

Cet homme paraissait âgé de vingt-cinq ans environ ; sa taille haute et bien prise dénotait une force musculaire peu commune ; son visage, bronzé par le soleil et les intempéries, et éclairé par des yeux d’un bleu sombre, était orné d’une courte barbe blonde, et une épaisse chevelure rousse s’échappait de son bonnet de peau de castor. Son costume, fait de peaux de daim, était celui des chasseurs canadiens.

Louis Martel, ainsi qu’il se nommait, était né de parents normands fixés au Canada depuis une trentaine d’années. Dès l’âge de seize ans il avait été séduit par la rude vie des coureurs des bois. Cette existence, si pleine de périls de toutes sortes, plaisait à son caractère énergique et aventureux ; aussi n’avait-il pas tardé à jouir, au désert, d’une réputation d’intrépidité qui lui avait valu le surnom de Sans-Peur, sous lequel nous le désignerons désormais.

Sa présence à l’endroit où nous le présentons au lecteur prouve suffisamment qu’il était digne du nom glorieux que lui avaient donné les Indiens et les coureurs des bois. En effet, à cette époque la France soutenait désespérément une lutte inégale contre l’Angleterre, qui dépensait sans compter les hommes et les millions pour nous arracher le Canada, objet de ses plus ardentes convoitises. Pour s’aventurer ainsi seul dans ces solitudes, il fallait que Sans-Peur fût réellement doué d’un courage à toute épreuve, car les Iroquois, alliés aux Anglais comme les Hurons l’étaient aux Français parcouraient sans cesse les forêts, tuant et pillant, non pour être agréables à ceux qui les employaient, mais afin de satisfaire leur cupidité et leur rage sanguinaire. Les Anglais eux-mêmes redoutaient leurs farouches alliés.

Sans-Peur était depuis une heure absorbé par ses pensées, quand un bruit vague lui fit dresser l’oreille.

Il se pencha en avant en écoutant attentivement.

— Ah ! ah ! fit-il soudain, qu’est-ce que cela ?

Et, d’un bond, il fut abrité derrière un rocher, le doigt sur la gâchette de son fusil.

Le bruit se rapprochait de plus en plus, et le Canadien distingua bientôt les pas précipités de plusieurs hommes.

Tout à coup, un Indien passa comme une flèche à travers un fourré et s’embusqua derrière un rocher, à dix pas à peine du chasseur, qui avait du premier coup d’œil reconnu un guerrier huron.

— Bon ! pensa Sans-Peur, il est poursuivi par des Iroquois ; nous allons rire.

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