Veillées d’Ukraine

Fiction & Literature, Literary
Cover of the book Veillées d’Ukraine by Nicolas Vassiliévitch Gogol, GILBERT TEROL
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Author: Nicolas Vassiliévitch Gogol ISBN: 1230000203717
Publisher: GILBERT TEROL Publication: December 18, 2013
Imprint: Language: French
Author: Nicolas Vassiliévitch Gogol
ISBN: 1230000203717
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: December 18, 2013
Imprint:
Language: French

— Non, amis, non, je ne veux pas. Assez de folies ! Tout doit avoir une fin. On ne nous traite que déjà trop de cerveaux brûlés ! Allons-nous coucher ! …

Ainsi parlait Levko à ses compagnons de noces qui voulaient l’entraîner à de nouvelles escapades.

— Adieu, frères. Bonne nuit. — Et il s’éloigna à grands pas.

« Ma Hanna dort-elle ? » pensait-il en s’approchant de la Khata aux cerisiers nains que nous connaissons.

Le silence fut soudain interrompu par des paroles échangées à voix basse.

Levko écouta. Le blanc d’une chemise s’apercevait à travers les arbres.

« Qu’est-ce que cela signifie ? » pensa-t-il. Et se glissant en avant, il se cacha derrière le tronc d’un arbre.

À la clarté de la lune, éclatait un visage de jeune fille… C’est Hanna ! « Mais quel est donc cet homme de grande taille dont je ne vois que le dos ? » En vain écarquillait-il les yeux, l’ombre lui cachait l’inconnu des pieds à la tête. La poitrine seule était un peu éclairée ; et le moindre pas en avant de Levko l’eût exposé à se faire surprendre.

S’appuyant sans bruit contre l’arbre, il résolut de rester immobile.

La jeune fille prononça distinctement son nom.

— Levko ? … Levko est encore un blanc-bec — disait d’une voix basse et enrouée l’homme de haute taille. — Si je ne le rencontre jamais chez toi, je lui tirerai les oreilles…

— Je voudrais bien connaître le coquin qui se vante de me tirer les oreilles — se dit Levko, et il avança la tête de façon à ne pas perdre un seul mot ; mais l’inconnu continuait à parler si bas, qu’il était impossible de rien entendre.

— Tu n’as donc pas honte ! fit Hanna, après que son interlocuteur se fut tu, — tu mens, tu me trompes, tu ne m’aimes pas ; je ne croirai jamais que tu m’aies aimée !

— Je sais, reprenait l’homme de haute taille, Levko t’a conté un tas de bêtises et il t’a fait tourner la tête.

Cette fois il parut au jeune homme que la voix de l’inconnu ne lui était plus aussi inconnue, qu’il l’avait déjà entendue quelque part.

— Je me charge de ton Levko, continuait toujours l’inconnu. Il s’imagine que je ne vois pas toutes ses polissonneries. Je lui apprendrai, à ce fils de chien, la couleur de mes poings.

À ces paroles, Levko ne put retenir sa colère. Se précipitant vers l’inconnu, il leva son bras sur lui pour lui administrer une volée sous laquelle, tout robuste qu’il fût, l’inconnu n’aurait pu tenir, mais, au même moment, la lune éclaira son visage, et Levko resta comme pétrifié, il avait devant lui son père.

Seuls un hochement de sa tête et un léger sifflement exprimèrent sa stupéfaction.

On entendit un frôlement. Hanna disparut dans sa Khata en poussant derrière elle la porte.

— Adieu Hanna ! s’écria alors un des jeunes gens survenant tout à coup et ouvrant ses bras pour la suivre ; mais, ô terreur ! il se rejeta en arrière, stupéfait de s’être heurté aux raides moustaches du bailli.

— Adieu, adieu, Hanna, continuèrent plusieurs jeunes gens en se suspendant à son cou.

— Allez au diable, polissons maudits, hurlait le bailli en se débattant et en frappant rageusement la terre du pied. — Pour quelle Hanna me prenez-vous ? Allez donc prendre à la potence la place de vos pères, fils de Satan ! Vous êtes comme autant de mouches après le miel. Je vous en donnerai des Hanna ! …

— Le bailli ! le bailli ! c’est le bailli ! s’écrièrent les jeunes gens en se dispersant de tous côtés.

— Voyez-vous ce père ! fit Levko revenu de sa stupeur et suivant des yeux le bailli qui s’éloignait en jurant — quel polisson cela fait ! c’est joli ! Et moi qui m’étonnais et qui ne comprenais rien à cette énigme de la sourde oreille qu’il me fait lorsque je lui parle de mes amours. Attends un peu, vieux raifort ; je t’apprendrai à courir la fiancée d’autrui.

— Hé ! hé ! vous autres. Ici, ici, criait Levko en faisant de la main signe à ses amis qui, de nouveau, s’étaient rassemblés. — Venez vite. Je vous ai tout à l’heure engagés à aller vous coucher, mais maintenant j’ai réfléchi, me voilà prêt à nocer avec vous toute la nuit s’il faut.

— À la bonne heure, reprit l’un d’eux large d’épaules et bien bâti et qui passait pour le premier noceur et le plus grand polisson de la bande. — Je ne suis pas dans mon assiette lorsque je n’ai pas assez nocé. Il me semble qu’il me manque quelque chose, comme si j’avais perdu mon bonnet ou ma pipe. En un mot, je ne suis plus un Cosaque, c’est tout dire.

— Êtes-vous décidés à bien faire endiabler le bailli ?

— Le bailli ?

— Oui, le bailli. Qu’est-ce qu’il s’est fiché dans la tête ? Il fait ici son hetmann. Il ne lui suffit pas de nous traiter en esclaves, il s’acharne encore après nos filles. Il n’est peut-être pas dans tout le village une seule fille à peu près jolie qu’il n’ait relancée.

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— Non, amis, non, je ne veux pas. Assez de folies ! Tout doit avoir une fin. On ne nous traite que déjà trop de cerveaux brûlés ! Allons-nous coucher ! …

Ainsi parlait Levko à ses compagnons de noces qui voulaient l’entraîner à de nouvelles escapades.

— Adieu, frères. Bonne nuit. — Et il s’éloigna à grands pas.

« Ma Hanna dort-elle ? » pensait-il en s’approchant de la Khata aux cerisiers nains que nous connaissons.

Le silence fut soudain interrompu par des paroles échangées à voix basse.

Levko écouta. Le blanc d’une chemise s’apercevait à travers les arbres.

« Qu’est-ce que cela signifie ? » pensa-t-il. Et se glissant en avant, il se cacha derrière le tronc d’un arbre.

À la clarté de la lune, éclatait un visage de jeune fille… C’est Hanna ! « Mais quel est donc cet homme de grande taille dont je ne vois que le dos ? » En vain écarquillait-il les yeux, l’ombre lui cachait l’inconnu des pieds à la tête. La poitrine seule était un peu éclairée ; et le moindre pas en avant de Levko l’eût exposé à se faire surprendre.

S’appuyant sans bruit contre l’arbre, il résolut de rester immobile.

La jeune fille prononça distinctement son nom.

— Levko ? … Levko est encore un blanc-bec — disait d’une voix basse et enrouée l’homme de haute taille. — Si je ne le rencontre jamais chez toi, je lui tirerai les oreilles…

— Je voudrais bien connaître le coquin qui se vante de me tirer les oreilles — se dit Levko, et il avança la tête de façon à ne pas perdre un seul mot ; mais l’inconnu continuait à parler si bas, qu’il était impossible de rien entendre.

— Tu n’as donc pas honte ! fit Hanna, après que son interlocuteur se fut tu, — tu mens, tu me trompes, tu ne m’aimes pas ; je ne croirai jamais que tu m’aies aimée !

— Je sais, reprenait l’homme de haute taille, Levko t’a conté un tas de bêtises et il t’a fait tourner la tête.

Cette fois il parut au jeune homme que la voix de l’inconnu ne lui était plus aussi inconnue, qu’il l’avait déjà entendue quelque part.

— Je me charge de ton Levko, continuait toujours l’inconnu. Il s’imagine que je ne vois pas toutes ses polissonneries. Je lui apprendrai, à ce fils de chien, la couleur de mes poings.

À ces paroles, Levko ne put retenir sa colère. Se précipitant vers l’inconnu, il leva son bras sur lui pour lui administrer une volée sous laquelle, tout robuste qu’il fût, l’inconnu n’aurait pu tenir, mais, au même moment, la lune éclaira son visage, et Levko resta comme pétrifié, il avait devant lui son père.

Seuls un hochement de sa tête et un léger sifflement exprimèrent sa stupéfaction.

On entendit un frôlement. Hanna disparut dans sa Khata en poussant derrière elle la porte.

— Adieu Hanna ! s’écria alors un des jeunes gens survenant tout à coup et ouvrant ses bras pour la suivre ; mais, ô terreur ! il se rejeta en arrière, stupéfait de s’être heurté aux raides moustaches du bailli.

— Adieu, adieu, Hanna, continuèrent plusieurs jeunes gens en se suspendant à son cou.

— Allez au diable, polissons maudits, hurlait le bailli en se débattant et en frappant rageusement la terre du pied. — Pour quelle Hanna me prenez-vous ? Allez donc prendre à la potence la place de vos pères, fils de Satan ! Vous êtes comme autant de mouches après le miel. Je vous en donnerai des Hanna ! …

— Le bailli ! le bailli ! c’est le bailli ! s’écrièrent les jeunes gens en se dispersant de tous côtés.

— Voyez-vous ce père ! fit Levko revenu de sa stupeur et suivant des yeux le bailli qui s’éloignait en jurant — quel polisson cela fait ! c’est joli ! Et moi qui m’étonnais et qui ne comprenais rien à cette énigme de la sourde oreille qu’il me fait lorsque je lui parle de mes amours. Attends un peu, vieux raifort ; je t’apprendrai à courir la fiancée d’autrui.

— Hé ! hé ! vous autres. Ici, ici, criait Levko en faisant de la main signe à ses amis qui, de nouveau, s’étaient rassemblés. — Venez vite. Je vous ai tout à l’heure engagés à aller vous coucher, mais maintenant j’ai réfléchi, me voilà prêt à nocer avec vous toute la nuit s’il faut.

— À la bonne heure, reprit l’un d’eux large d’épaules et bien bâti et qui passait pour le premier noceur et le plus grand polisson de la bande. — Je ne suis pas dans mon assiette lorsque je n’ai pas assez nocé. Il me semble qu’il me manque quelque chose, comme si j’avais perdu mon bonnet ou ma pipe. En un mot, je ne suis plus un Cosaque, c’est tout dire.

— Êtes-vous décidés à bien faire endiabler le bailli ?

— Le bailli ?

— Oui, le bailli. Qu’est-ce qu’il s’est fiché dans la tête ? Il fait ici son hetmann. Il ne lui suffit pas de nous traiter en esclaves, il s’acharne encore après nos filles. Il n’est peut-être pas dans tout le village une seule fille à peu près jolie qu’il n’ait relancée.

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