La Fin de notre ère

Fiction & Literature, Literary
Cover of the book La Fin de notre ère by LÉON TOLSTOÏ, GILBERT TEROL
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Author: LÉON TOLSTOÏ ISBN: 1230001232127
Publisher: GILBERT TEROL Publication: July 17, 2016
Imprint: Language: French
Author: LÉON TOLSTOÏ
ISBN: 1230001232127
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: July 17, 2016
Imprint:
Language: French

Extrait :

La fin du siècle, dans le langage évangélique, cela ne signifie point la fin d’une période de cent ans et le commencement d’une autre, mais la fin d’une certaine conception du monde, la fin d’une religion, d’un moyen de communion des hommes et le commencement d’une nouvelle conception du monde, d’une autre religion, d’un autre moyen de communion.

Il est dit dans l’Évangile qu’à tel passage d’un siècle à l’autre des maux de toutes sortes se produiront : trahisons, tromperies, cruautés, guerres, et qu’à cause des crimes l’amour se refroidira. Pour moi ces paroles ne sont point une prophétie surnaturelle ; elles indiquent que quand la religion, l’ordre de la vie dans lequel vivaient les hommes sera remplacé par un autre ; quand l’ancien ordre de choses croulera et fera place au nouveau, fatalement se produiront de grandes émeutes, des cruautés, des tromperies, des trahisons, des crimes de toutes sortes, et à cause de ces crimes, se refroidira l’amour, la chose la plus importante et la plus nécessaire pour la vie sociale.

C’est ce qui se passe maintenant, non seulement en Russie, mais dans tout le monde chrétien, avec cette différence que ce qui existe à l’état latent dans tout le reste du monde chrétien se manifeste, en Russie, clairement et ouvertement.

J’estime que la vie des peuples chrétiens est précisément arrivée à cette limite qui sépare le vieux siècle qui meurt du nouveau qui naît : je pense que c’est précisément maintenant que commence à s’opérer cette grande transformation qui, depuis près de 2.000 ans, se préparait dans le monde chrétien, transformation dont le but est de remplacer le christianisme déformé — et la puissance des uns basée sur lui et l’esclavage des autres — par le vrai christianisme, par l’égalité et la vraie liberté de tous les hommes, liberté propre à tous les êtres raisonnables.

Je vois les indices extérieurs de cette transformation dans la lutte aiguë des classes, chez tous les peuples ; dans la froide cruauté des riches ; dans la surexcitation et le désespoir des pauvres ; dans l’armement sans cesse accru de tous les États les uns contre les autres ; dans l’extension de la doctrine socialiste, irréalisable, horrible par son despotisme et superbe de légèreté ; dans l’inutilité et la sottise des raisonnements oisifs et des études appelées sciences qui sont tenues pour l’activité intellectuelle la plus importante ; dans la dépravation intellectuelle et le vide de l’art en toutes ses manifestations, et, surtout, non seulement dans l’absence, chez les dirigeants, de toute religion, mais dans la négation consciente de toute religion, remplacée par la reconnaissance de la légitimité de l’oppression des faibles par les forts et, par conséquent, dans l’absence complète de toute base raisonnable dans la vie.

Tels sont les indices généraux de la transformation qui approche, ou plutôt de l’état transitoire amenant cette transformation, dans lequel se trouvent les peuples chrétiens. Et les indices temporaires, historiques, ou cette poussée qui doit amener la transformation, c’est la guerre russo-japonaise qui vient de se terminer et le mouvement révolutionnaire qui s’est allumé avec elle et qui jusqu’alors ne s’était jamais manifesté parmi le peuple russe.

On voit les causes de l’écrasement de l’armée et de la flotte russes, par les Japonais, dans des hasards malheureux, dans les abus des gouvernants russes ; on voit la cause du mouvement révolutionnaire, en Russie, dans le mauvais gouvernement, dans la suractivité des révolutionnaires ; et pour les hommes politiques russes ainsi que pour les étrangers, ces événements ont pour conséquence l’affaiblissement de la Russie, le déplacement du centre de gravité des relations internationales, le changement de forme du gouvernement de cet empire.

Pour moi, ces événements ont une importance beaucoup plus grande. Ce n’est pas seulement l’écrasement de l’armée et de la flotte russes, la débâcle de l’ordre gouvernemental russe, c’est l’indice du commencement de la désagrégation de la Russie. Et cette désagrégation de la Russie est, selon moi, l’indice du commencement de la destruction de toute la civilisation pseudo-chrétienne ; c’est la fin du vieux siècle et le commencement du nouveau. Ce qui a amené les peuples chrétiens à la situation où ils se trouvent maintenant a des origines lointaines ; depuis que le christianisme fut reconnu comme religion d’État.

Un gouvernement qui s’appuie sur la violence, qui exige, pour son existence, l’obéissance absolue à ses lois de préférence, s’il le faut, à la loi religieuse ; un gouvernement qui ne peut exister sans supplices, sans armée, sans guerres, qui attribue à ses gouvernants une importance quasi divine, qui glorifie la richesse et la puissance ; un tel gouvernement accepte, dans la personne de ses gouvernants et de ses sujets, la religion chrétienne, qui proclame l’égalité absolue et la liberté de tous les hommes.

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Extrait :

La fin du siècle, dans le langage évangélique, cela ne signifie point la fin d’une période de cent ans et le commencement d’une autre, mais la fin d’une certaine conception du monde, la fin d’une religion, d’un moyen de communion des hommes et le commencement d’une nouvelle conception du monde, d’une autre religion, d’un autre moyen de communion.

Il est dit dans l’Évangile qu’à tel passage d’un siècle à l’autre des maux de toutes sortes se produiront : trahisons, tromperies, cruautés, guerres, et qu’à cause des crimes l’amour se refroidira. Pour moi ces paroles ne sont point une prophétie surnaturelle ; elles indiquent que quand la religion, l’ordre de la vie dans lequel vivaient les hommes sera remplacé par un autre ; quand l’ancien ordre de choses croulera et fera place au nouveau, fatalement se produiront de grandes émeutes, des cruautés, des tromperies, des trahisons, des crimes de toutes sortes, et à cause de ces crimes, se refroidira l’amour, la chose la plus importante et la plus nécessaire pour la vie sociale.

C’est ce qui se passe maintenant, non seulement en Russie, mais dans tout le monde chrétien, avec cette différence que ce qui existe à l’état latent dans tout le reste du monde chrétien se manifeste, en Russie, clairement et ouvertement.

J’estime que la vie des peuples chrétiens est précisément arrivée à cette limite qui sépare le vieux siècle qui meurt du nouveau qui naît : je pense que c’est précisément maintenant que commence à s’opérer cette grande transformation qui, depuis près de 2.000 ans, se préparait dans le monde chrétien, transformation dont le but est de remplacer le christianisme déformé — et la puissance des uns basée sur lui et l’esclavage des autres — par le vrai christianisme, par l’égalité et la vraie liberté de tous les hommes, liberté propre à tous les êtres raisonnables.

Je vois les indices extérieurs de cette transformation dans la lutte aiguë des classes, chez tous les peuples ; dans la froide cruauté des riches ; dans la surexcitation et le désespoir des pauvres ; dans l’armement sans cesse accru de tous les États les uns contre les autres ; dans l’extension de la doctrine socialiste, irréalisable, horrible par son despotisme et superbe de légèreté ; dans l’inutilité et la sottise des raisonnements oisifs et des études appelées sciences qui sont tenues pour l’activité intellectuelle la plus importante ; dans la dépravation intellectuelle et le vide de l’art en toutes ses manifestations, et, surtout, non seulement dans l’absence, chez les dirigeants, de toute religion, mais dans la négation consciente de toute religion, remplacée par la reconnaissance de la légitimité de l’oppression des faibles par les forts et, par conséquent, dans l’absence complète de toute base raisonnable dans la vie.

Tels sont les indices généraux de la transformation qui approche, ou plutôt de l’état transitoire amenant cette transformation, dans lequel se trouvent les peuples chrétiens. Et les indices temporaires, historiques, ou cette poussée qui doit amener la transformation, c’est la guerre russo-japonaise qui vient de se terminer et le mouvement révolutionnaire qui s’est allumé avec elle et qui jusqu’alors ne s’était jamais manifesté parmi le peuple russe.

On voit les causes de l’écrasement de l’armée et de la flotte russes, par les Japonais, dans des hasards malheureux, dans les abus des gouvernants russes ; on voit la cause du mouvement révolutionnaire, en Russie, dans le mauvais gouvernement, dans la suractivité des révolutionnaires ; et pour les hommes politiques russes ainsi que pour les étrangers, ces événements ont pour conséquence l’affaiblissement de la Russie, le déplacement du centre de gravité des relations internationales, le changement de forme du gouvernement de cet empire.

Pour moi, ces événements ont une importance beaucoup plus grande. Ce n’est pas seulement l’écrasement de l’armée et de la flotte russes, la débâcle de l’ordre gouvernemental russe, c’est l’indice du commencement de la désagrégation de la Russie. Et cette désagrégation de la Russie est, selon moi, l’indice du commencement de la destruction de toute la civilisation pseudo-chrétienne ; c’est la fin du vieux siècle et le commencement du nouveau. Ce qui a amené les peuples chrétiens à la situation où ils se trouvent maintenant a des origines lointaines ; depuis que le christianisme fut reconnu comme religion d’État.

Un gouvernement qui s’appuie sur la violence, qui exige, pour son existence, l’obéissance absolue à ses lois de préférence, s’il le faut, à la loi religieuse ; un gouvernement qui ne peut exister sans supplices, sans armée, sans guerres, qui attribue à ses gouvernants une importance quasi divine, qui glorifie la richesse et la puissance ; un tel gouvernement accepte, dans la personne de ses gouvernants et de ses sujets, la religion chrétienne, qui proclame l’égalité absolue et la liberté de tous les hommes.

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