Les Compagnons de Jéhu

Fiction & Literature, Classics
Cover of the book Les Compagnons de Jéhu by Alexandre Dumas, Largau
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Author: Alexandre Dumas ISBN: 1230000265598
Publisher: Largau Publication: August 4, 2014
Imprint: Language: French
Author: Alexandre Dumas
ISBN: 1230000265598
Publisher: Largau
Publication: August 4, 2014
Imprint:
Language: French

Extrait du livre :

Le 9 octobre de l’année 1799, par une belle journée de cet automne méridional qui fait, aux deux extrémités de la Provence, mûrir les oranges d’Hyères et les raisins de Saint-Péray, une calèche attelée de trois chevaux de poste traversait à fond de train le pont jeté sur la Durance, entre Cavaillon et Château-Renard, se dirigeant sur Avignon, l’ancienne ville papale, qu’un décret du 25 mai 1791 avait, huit ans auparavant, réunie à la France, réunion confirmée par le traité signé, en 1797, à Tolentino, entre le général Bonaparte et le pape Pie VI.

La voiture entra par la porte d’Aix, traversa dans toute sa longueur, et sans ralentir sa course, la ville aux rues étroites et tortueuses, bâtie tout à la fois contre le vent et contre le soleil, et alla s’arrêter à cinquante pas de la porte d’Oulle, à l’hôtel du Palais-Égalité, que l’on commençait tout doucement à rappeler l’hôtel du Palais-Royal, nom qu’il avait porté autrefois et qu’il porte encore aujourd’hui.

Ces quelques mots, presque insignifiants, à propos du titre de l’hôtel devant lequel s’arrêtait la chaise de poste sur laquelle nous avons les yeux fixés, indiquent assez bien l’état où était la France sous ce gouvernement de réaction thermidorienne que l’on appelait le Directoire.

Après la lutte révolutionnaire qui s’était accomplie du 14 juillet 1789 au 9 thermidor 1794 ; après les journées des 5 et 6 octobre, du 21 juin, du 10 août, des 2 et 3 septembre, du 21 mai, du 29 thermidor, et du 1er prairial ; après avoir vu tomber la tête du roi et de ses juges, de la reine et de son accusateur, des Girondins et des Cordeliers, des modérés et des Jacobins, la France avait éprouvé la plus effroyable et la plus nauséabonde de toutes les lassitudes, la lassitude du sang !

Elle en était donc revenue, sinon au besoin de la royauté, du moins au désir d’un gouvernement fort, dans lequel elle pût mettre sa confiance, sur lequel elle pût s’appuyer, qui agît pour elle et qui lui permît de se reposer elle-même pendant qu’il agissait.

À la place de ce gouvernement vaguement désiré, elle avait le faible et irrésolu Directoire, composé pour le moment du voluptueux Barras, de l’intrigant Sieyès, du brave Moulins, de l’insignifiant Roger Ducos et de l’honnête, mais un peu trop naïf, Gohier.

Il en résultait une dignité médiocre au dehors et une tranquillité fort contestable au dedans.

Il est vrai qu’au moment où nous en sommes arrivés, nos armées, si glorieuses pendant les campagnes épiques de 1796 et 1797, un instant refoulées vers la France par l’incapacité de Scherer à Vérone et à Cassano, et par la défaite et la mort de Joubert à Novi, commencent à reprendre l’offensive. Moreau a battu Souvaroff à Bassignano ; Brune a battu le duc d’York et le général Hermann à Bergen ; Masséna a anéanti les Austro-Russes à Zurich ; Korsakov s’est sauvé à grand-peine et l’Autrichien Hotz ainsi que trois autres généraux ont été tués, et cinq faits prisonniers.

Masséna a sauvé la France à Zurich, comme, quatre-vingt-dix ans auparavant, Villars l’avait sauvée à Denain.

Mais, à l’intérieur, les affaires n’étaient point en si bon état, et le gouvernement directorial était, il faut le dire, fort embarrassé entre la guerre de la Vendée et les brigandages du Midi, auxquels, selon son habitude, la population avignonnaise était loin de rester étrangère.

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Extrait du livre :

Le 9 octobre de l’année 1799, par une belle journée de cet automne méridional qui fait, aux deux extrémités de la Provence, mûrir les oranges d’Hyères et les raisins de Saint-Péray, une calèche attelée de trois chevaux de poste traversait à fond de train le pont jeté sur la Durance, entre Cavaillon et Château-Renard, se dirigeant sur Avignon, l’ancienne ville papale, qu’un décret du 25 mai 1791 avait, huit ans auparavant, réunie à la France, réunion confirmée par le traité signé, en 1797, à Tolentino, entre le général Bonaparte et le pape Pie VI.

La voiture entra par la porte d’Aix, traversa dans toute sa longueur, et sans ralentir sa course, la ville aux rues étroites et tortueuses, bâtie tout à la fois contre le vent et contre le soleil, et alla s’arrêter à cinquante pas de la porte d’Oulle, à l’hôtel du Palais-Égalité, que l’on commençait tout doucement à rappeler l’hôtel du Palais-Royal, nom qu’il avait porté autrefois et qu’il porte encore aujourd’hui.

Ces quelques mots, presque insignifiants, à propos du titre de l’hôtel devant lequel s’arrêtait la chaise de poste sur laquelle nous avons les yeux fixés, indiquent assez bien l’état où était la France sous ce gouvernement de réaction thermidorienne que l’on appelait le Directoire.

Après la lutte révolutionnaire qui s’était accomplie du 14 juillet 1789 au 9 thermidor 1794 ; après les journées des 5 et 6 octobre, du 21 juin, du 10 août, des 2 et 3 septembre, du 21 mai, du 29 thermidor, et du 1er prairial ; après avoir vu tomber la tête du roi et de ses juges, de la reine et de son accusateur, des Girondins et des Cordeliers, des modérés et des Jacobins, la France avait éprouvé la plus effroyable et la plus nauséabonde de toutes les lassitudes, la lassitude du sang !

Elle en était donc revenue, sinon au besoin de la royauté, du moins au désir d’un gouvernement fort, dans lequel elle pût mettre sa confiance, sur lequel elle pût s’appuyer, qui agît pour elle et qui lui permît de se reposer elle-même pendant qu’il agissait.

À la place de ce gouvernement vaguement désiré, elle avait le faible et irrésolu Directoire, composé pour le moment du voluptueux Barras, de l’intrigant Sieyès, du brave Moulins, de l’insignifiant Roger Ducos et de l’honnête, mais un peu trop naïf, Gohier.

Il en résultait une dignité médiocre au dehors et une tranquillité fort contestable au dedans.

Il est vrai qu’au moment où nous en sommes arrivés, nos armées, si glorieuses pendant les campagnes épiques de 1796 et 1797, un instant refoulées vers la France par l’incapacité de Scherer à Vérone et à Cassano, et par la défaite et la mort de Joubert à Novi, commencent à reprendre l’offensive. Moreau a battu Souvaroff à Bassignano ; Brune a battu le duc d’York et le général Hermann à Bergen ; Masséna a anéanti les Austro-Russes à Zurich ; Korsakov s’est sauvé à grand-peine et l’Autrichien Hotz ainsi que trois autres généraux ont été tués, et cinq faits prisonniers.

Masséna a sauvé la France à Zurich, comme, quatre-vingt-dix ans auparavant, Villars l’avait sauvée à Denain.

Mais, à l’intérieur, les affaires n’étaient point en si bon état, et le gouvernement directorial était, il faut le dire, fort embarrassé entre la guerre de la Vendée et les brigandages du Midi, auxquels, selon son habitude, la population avignonnaise était loin de rester étrangère.

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