Ève Effingham où l’Amérique, Annoté

Fiction & Literature, Literary
Cover of the book Ève Effingham où l’Amérique, Annoté by JAMES FENIMORE COOPER, GILBERT TEROL
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Author: JAMES FENIMORE COOPER ISBN: 1230000212937
Publisher: GILBERT TEROL Publication: January 26, 2014
Imprint: Language: French
Author: JAMES FENIMORE COOPER
ISBN: 1230000212937
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: January 26, 2014
Imprint:
Language: French

Extrait :

È ve et sa cousine trouvèrent dans le salon sir George Templemore et le capitaine Truck ; le premier ayant retardé son départ de New-York pour rester près de ses amis, et le second étant sur le point de mettre à la voile pour faire un voyage en Europe. En y ajoutant M. Bragg et les habitants de la maison, le lecteur connaîtra toute la compagnie. Aristobule n’avait jamais pris place à une table servie d’une manière si brillante, et, pour la première fois de sa vie, il vit des bougies allumées pour le dîner ; mais il n’était pas homme à se laisser déconcerter par une nouveauté. S’il eût été un Européen, ayant reçu la même éducation et contracté les mêmes habitudes, il se serait fait remarquer par cinquante gaucheries avant que le dessert eût été placé sur la table ; mais étant ce qu’il était, un observateur, fermant les yeux sur le désir excessif de paraître poli qui marquait sa conduite, l’aurait laissé confondu parmi cette foule d’êtres qui n’excitent aucune attention, sans la manière remarquable dont il se servait à table. Il est vrai qu’il invitait ses voisins à manger de tous les mets auxquels il pouvait atteindre, mais il se servait de son couteau, en place de fourchette, avec la même grâce qu’un porteur de charbon se sert de sa pelle. Cependant comme la compagnie dans laquelle il se trouvait, quoique observant strictement toutes les bienséances, avait trop d’esprit pour s’occuper à examiner si chacun en faisait autant, cette infraction aux convenances ne fut pas remarquée, ou du moins ne donna lieu à aucune observation. Il n’en fut pas de même de la première particularité à laquelle il a été fait allusion, et comme elle est caractéristique, il faut en parler un peu plus au long.

Le dîner étant servi à la française, chaque plat était pris tour à tour par un domestique, qui, après l’avoir découpé, le présentait à chaque convive. Mais la dignité trop lente de cet arrangement ne convenait pas à l’empressement d’Aristobule : au lieu donc d’attendre que les domestiques lui présentassent les plats avec ordre, il se mit à se servir lui-même, ce qu’il fit avec une dextérité qu’il avait acquise en fréquentant les tables d’hôtes, école, soit dit en passant, où il avait principalement puisé ses idées sur les convenances de la table. Il se servit aussi d’un couple de plats qui lui furent successivement présentés dans le cours du service régulier, et comme un homme qui, par un coup de bonheur, aurait jeté les fondations d’une fortune au commencement de sa carrière, il y fit des additions à droite et à gauche. Il attaquait ainsi les entremets séduisants qui étaient à sa portée, s’adressait à ses voisins pour obtenir de ceux auxquels il ne pouvait atteindre, et enfin envoyait son assiette pour se faire servir des mets qui étaient encore plus loin, quand il remarquait un plat qui lui semblait en valoir la peine. Par ces moyens, qu’il employait à petit bruit et avec une tranquillité qui écartait de lui les observations, il réussit à faire de son assiette un épitomé du premier service. Elle contenait au centre du poisson, du bœuf et du jambon ; tout autour, il avait arrangé des croquettes, des rognons et divers ragoûts ; le tout était surmonté d’une pyramide de divers légumes, et les bords de l’assiette étaient garnis de sel, de poivre et de moutarde. Cette accumulation de bonnes choses exigea du temps et de l’adresse, et la plupart des convives avaient plusieurs fois changé d’assiette avant qu’Aristobule eût mangé un morceau, excepté la soupe. L’heureux moment où sa dextérité allait être récompensée arriva enfin, et le gérant du domaine de Templeton allait passer à la mastication ou plutôt à la déglutition, car à peine songeait-il à la première de ces opérations, quand il entendit sauter le bouchon d’une bouteille. Il aimait passionnément le vin de Champagne, quoiqu’il n’eût jamais fait assez de progrès dans la science de la table pour savoir quel était le moment de le servir. Ce moment était arrivé pour tous les autres convives qui avaient fait honneur au premier service ; mais M. Bragg en était encore aussi loin que lorsqu’il s’était mis à table. Cependant, voyant Pierre arriver près de lui avec la bouteille, il présenta son verre, et jouit d’un moment délicieux en avalant un breuvage qui surpassait de beaucoup tout ce qu’il n’avait jamais vu sortir d’un goulot couvert de goudron ou de plomb dans divers cabarets de sa connaissance, où les bouteilles semblaient être des batteries ennemies, chargées de maux de tête et d’estomac.

Aristobule vida son verre d’un seul trait et fit claquer ses lèvres après l’avoir vidé ; mais ce fut un instant malheureux, son assiette, chargée de tous les trésors qu’il avait amassés, ayant été enlevée par un domestique, qui crut, en voyant un tel salmigondis, qu’aucun de ces mets n’avait été du goût de ce convive difficile.

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Extrait :

È ve et sa cousine trouvèrent dans le salon sir George Templemore et le capitaine Truck ; le premier ayant retardé son départ de New-York pour rester près de ses amis, et le second étant sur le point de mettre à la voile pour faire un voyage en Europe. En y ajoutant M. Bragg et les habitants de la maison, le lecteur connaîtra toute la compagnie. Aristobule n’avait jamais pris place à une table servie d’une manière si brillante, et, pour la première fois de sa vie, il vit des bougies allumées pour le dîner ; mais il n’était pas homme à se laisser déconcerter par une nouveauté. S’il eût été un Européen, ayant reçu la même éducation et contracté les mêmes habitudes, il se serait fait remarquer par cinquante gaucheries avant que le dessert eût été placé sur la table ; mais étant ce qu’il était, un observateur, fermant les yeux sur le désir excessif de paraître poli qui marquait sa conduite, l’aurait laissé confondu parmi cette foule d’êtres qui n’excitent aucune attention, sans la manière remarquable dont il se servait à table. Il est vrai qu’il invitait ses voisins à manger de tous les mets auxquels il pouvait atteindre, mais il se servait de son couteau, en place de fourchette, avec la même grâce qu’un porteur de charbon se sert de sa pelle. Cependant comme la compagnie dans laquelle il se trouvait, quoique observant strictement toutes les bienséances, avait trop d’esprit pour s’occuper à examiner si chacun en faisait autant, cette infraction aux convenances ne fut pas remarquée, ou du moins ne donna lieu à aucune observation. Il n’en fut pas de même de la première particularité à laquelle il a été fait allusion, et comme elle est caractéristique, il faut en parler un peu plus au long.

Le dîner étant servi à la française, chaque plat était pris tour à tour par un domestique, qui, après l’avoir découpé, le présentait à chaque convive. Mais la dignité trop lente de cet arrangement ne convenait pas à l’empressement d’Aristobule : au lieu donc d’attendre que les domestiques lui présentassent les plats avec ordre, il se mit à se servir lui-même, ce qu’il fit avec une dextérité qu’il avait acquise en fréquentant les tables d’hôtes, école, soit dit en passant, où il avait principalement puisé ses idées sur les convenances de la table. Il se servit aussi d’un couple de plats qui lui furent successivement présentés dans le cours du service régulier, et comme un homme qui, par un coup de bonheur, aurait jeté les fondations d’une fortune au commencement de sa carrière, il y fit des additions à droite et à gauche. Il attaquait ainsi les entremets séduisants qui étaient à sa portée, s’adressait à ses voisins pour obtenir de ceux auxquels il ne pouvait atteindre, et enfin envoyait son assiette pour se faire servir des mets qui étaient encore plus loin, quand il remarquait un plat qui lui semblait en valoir la peine. Par ces moyens, qu’il employait à petit bruit et avec une tranquillité qui écartait de lui les observations, il réussit à faire de son assiette un épitomé du premier service. Elle contenait au centre du poisson, du bœuf et du jambon ; tout autour, il avait arrangé des croquettes, des rognons et divers ragoûts ; le tout était surmonté d’une pyramide de divers légumes, et les bords de l’assiette étaient garnis de sel, de poivre et de moutarde. Cette accumulation de bonnes choses exigea du temps et de l’adresse, et la plupart des convives avaient plusieurs fois changé d’assiette avant qu’Aristobule eût mangé un morceau, excepté la soupe. L’heureux moment où sa dextérité allait être récompensée arriva enfin, et le gérant du domaine de Templeton allait passer à la mastication ou plutôt à la déglutition, car à peine songeait-il à la première de ces opérations, quand il entendit sauter le bouchon d’une bouteille. Il aimait passionnément le vin de Champagne, quoiqu’il n’eût jamais fait assez de progrès dans la science de la table pour savoir quel était le moment de le servir. Ce moment était arrivé pour tous les autres convives qui avaient fait honneur au premier service ; mais M. Bragg en était encore aussi loin que lorsqu’il s’était mis à table. Cependant, voyant Pierre arriver près de lui avec la bouteille, il présenta son verre, et jouit d’un moment délicieux en avalant un breuvage qui surpassait de beaucoup tout ce qu’il n’avait jamais vu sortir d’un goulot couvert de goudron ou de plomb dans divers cabarets de sa connaissance, où les bouteilles semblaient être des batteries ennemies, chargées de maux de tête et d’estomac.

Aristobule vida son verre d’un seul trait et fit claquer ses lèvres après l’avoir vidé ; mais ce fut un instant malheureux, son assiette, chargée de tous les trésors qu’il avait amassés, ayant été enlevée par un domestique, qui crut, en voyant un tel salmigondis, qu’aucun de ces mets n’avait été du goût de ce convive difficile.

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