Author: | Jean Aicard | ISBN: | 1230000222339 |
Publisher: | Jean Aicard | Publication: | March 2, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Jean Aicard |
ISBN: | 1230000222339 |
Publisher: | Jean Aicard |
Publication: | March 2, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
EXTRAIT:
NOTRE-DAME-D'AMOUR.
Zanette, c'était son nom de Jeanne, de Jeannette, comme elle le prononçait en zézayant, lorsqu'elle était toute petite. Tel il lui était resté. Ce qui, aussi, lui était resté, c'était sa grâce d'enfance, on ne sait quoi de tout mignon, de plus jeune qu'elle-même. Elle était belle de ses beaux seize ans, de son profil de Grecque, et de ses cheveux noirs, qui, sous le hennin à l'arlésienne, pendaient lourdement sur la blancheur dorée de son cou.
Elle avait seize ans avec l'air d'en avoir douze. Pourtant, on sentait la vie jeune et forte palpiter dans la chapelle, c'est-à-dire dans l'entre-bâillement des fichus aux plis innombrables, qui laissent voir un peu de la poitrine nue sur laquelle brille la croix d'or suspendue à la chaînette des grand'mères.
Zanette vivait à la ferme de la Sirène, bien tranquille à soigner ses poules, ses lapins, auprès de son père, maître Augias, le bayle. À l'ordinaire elle allait en Arles tous les dimanches.
Et bien souvent, assise au bord du Petit Rhône, seule, sous les saules et les aubes, elle rêvait en regardant l'eau, l'eau qui s'en allait vers la mer, vers la mer si grande, où des bateaux vont et viennent, comme des bêtes de rêve, comme de grands oiseaux aux ailes blanches.... Un songe d'inconnu accompagnait toujours Zanette. Ses beaux seize ans espéraient.
...N'est-ce pas qu'elle porte un joli nom, la ferme de la Sirène ? La Sirène (la Sereno) si vous interrogez les paysans, ils vous le diront, est un oiseau de passage, qui jamais ne s'arrête chez nous, et qui traverse seulement notre ciel, très haut. Quelquefois, le laboureur, en novembre, arrête son attelage, parce qu'il a entendu une harmonie lointaine, confuse, comme un son prolongé de viole ou de mandoline....
Et il écoute, en rêvant....
Ce sont les sirènes qui passent là-haut, tout là-haut. Elles sont plus petites que des tourterelles et leurs plumes miroitantes ont toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. On ne sait pas si la musique qu'elles font sort de leur gosier ou vient simplement de le vibration de leurs ailes. On croit plutôt que leur vol est harmonieux. Leur voix y ajoute une seule note qui, de temps en temps, scande et domine la mélodie des ailes.... Un jour, dit-on, comme on venait à peine de construire le château et sa ferme, une sirène un instant se posa sur le bouquet de tamaris en fleurs que les maçons plantent au bout d'une perche, sur la toiture, dès qu'elle est achevée. Et le château, et la ferme qui le touche, furent, voilà bien longtemps, baptisés du nom qu'ils portent encore.
EXTRAIT:
NOTRE-DAME-D'AMOUR.
Zanette, c'était son nom de Jeanne, de Jeannette, comme elle le prononçait en zézayant, lorsqu'elle était toute petite. Tel il lui était resté. Ce qui, aussi, lui était resté, c'était sa grâce d'enfance, on ne sait quoi de tout mignon, de plus jeune qu'elle-même. Elle était belle de ses beaux seize ans, de son profil de Grecque, et de ses cheveux noirs, qui, sous le hennin à l'arlésienne, pendaient lourdement sur la blancheur dorée de son cou.
Elle avait seize ans avec l'air d'en avoir douze. Pourtant, on sentait la vie jeune et forte palpiter dans la chapelle, c'est-à-dire dans l'entre-bâillement des fichus aux plis innombrables, qui laissent voir un peu de la poitrine nue sur laquelle brille la croix d'or suspendue à la chaînette des grand'mères.
Zanette vivait à la ferme de la Sirène, bien tranquille à soigner ses poules, ses lapins, auprès de son père, maître Augias, le bayle. À l'ordinaire elle allait en Arles tous les dimanches.
Et bien souvent, assise au bord du Petit Rhône, seule, sous les saules et les aubes, elle rêvait en regardant l'eau, l'eau qui s'en allait vers la mer, vers la mer si grande, où des bateaux vont et viennent, comme des bêtes de rêve, comme de grands oiseaux aux ailes blanches.... Un songe d'inconnu accompagnait toujours Zanette. Ses beaux seize ans espéraient.
...N'est-ce pas qu'elle porte un joli nom, la ferme de la Sirène ? La Sirène (la Sereno) si vous interrogez les paysans, ils vous le diront, est un oiseau de passage, qui jamais ne s'arrête chez nous, et qui traverse seulement notre ciel, très haut. Quelquefois, le laboureur, en novembre, arrête son attelage, parce qu'il a entendu une harmonie lointaine, confuse, comme un son prolongé de viole ou de mandoline....
Et il écoute, en rêvant....
Ce sont les sirènes qui passent là-haut, tout là-haut. Elles sont plus petites que des tourterelles et leurs plumes miroitantes ont toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. On ne sait pas si la musique qu'elles font sort de leur gosier ou vient simplement de le vibration de leurs ailes. On croit plutôt que leur vol est harmonieux. Leur voix y ajoute une seule note qui, de temps en temps, scande et domine la mélodie des ailes.... Un jour, dit-on, comme on venait à peine de construire le château et sa ferme, une sirène un instant se posa sur le bouquet de tamaris en fleurs que les maçons plantent au bout d'une perche, sur la toiture, dès qu'elle est achevée. Et le château, et la ferme qui le touche, furent, voilà bien longtemps, baptisés du nom qu'ils portent encore.