Maudit soit l’amour!

( Edition intégrale )

Romance, Science Fiction & Fantasy, Fiction & Literature, Classics, Literary
Cover of the book Maudit soit l’amour! by Hermine Lecomte du Nouÿ, Paris Calmann Lévy 1870
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Author: Hermine Lecomte du Nouÿ ISBN: 1230003023051
Publisher: Paris Calmann Lévy 1870 Publication: January 7, 2019
Imprint: Language: French
Author: Hermine Lecomte du Nouÿ
ISBN: 1230003023051
Publisher: Paris Calmann Lévy 1870
Publication: January 7, 2019
Imprint:
Language: French

Extrait: «Mon ami,...

»Je suis enfin installée et vous attends à Yerres, un de ces jours très prochains, demain, par exemple. Si vous prenez l’express de cinq heures, vous avez toute chance de faire le voyage avec Guillaume de Tanis, Jean Biroy, d’autres encore peut-être. Je vous invite tous ce même jour. Mais je compte particulièrement sur vous trois, mes chers fidèles. Ne m’écrivez pas que ceci… que cela… vous retient à Paris. Le cher Abbé sait bien que c’est le premier embarquement qui coûte à sa paresse. Tante Rose, d’ailleurs, me charge de vous dire qu’elle a fait préparer avec amour les chambres du Pavillon, et l’amour de tante Rose mérite le voyage! L’Abbé trouvera à Montgeron la voiture des invalides et pourra, si par grand hasard il est seul, rêver tout à son aise au despotisme tendre de son amie

»MAGDA.»

Lorsque madame Leprince-Mirbel eut achevé d’écrire cette lettre, elle la glissa dans une enveloppe, et, rassemblant d’autres lettres éparses sur son petit bureau, en relut avec soin les adresses.

—Voyons, n’en ai-je pas oublié? Jules Governeur, mon philosophe; Jean Biroy, mon peintre; Guillaume de Tanis, mon romancier; Savines, mon critique; d’Artigues, mon diplomate; Danaris et sa femme, celle-ci ma chère amie; Barjols, mon député; ils y sont bien tous. Bon. Maintenant donnons ces lettres au docteur; il les jettera à la poste en allant porter ses dépêches.

Madame Leprince-Mirbel se leva. C’était une femme de trente-six ans, de tournure élégante. Une grâce enveloppante émanait de tous ses gestes; elle possédait une allure aristocratique, un air «grande dame» qui ne s’acquiert pas. D’une taille souple, fine, en harmonie avec des hanches aux lignes du plus délicieux contour, elle avait aussi un pied mince et cambré, de belles mains, des mains pâles comme une hostie, aux doigts spirituels, retroussés et longs, qui suggéraient l’envie de les saisir et, à leur seul contact, donnaient la sensation troublante de posséder cette femme.

Tanis, en plaisantant, disait:

—Vos mains sont voluptueuses jusqu’à l’inconvenance.

Ses yeux cernés paraissaient d’autant plus grands que le dessus des paupières, estompé d’une teinte brune, ajoutait une étrange profondeur au regard de ses prunelles noires, brillantes comme deux agates dans le blanc nacré de l’œil. Ses cheveux blonds, légers, soyeux, abondants et ondés, ressemblaient à une coulée d’or.

Sans être ni belle, ni jolie, madame Mirbel produisait sur les hommes une impression ineffaçable, tant la finesse satinée de sa chair faisait ressortir la délicatesse de ses traits, tant son élégance accusait une science admirable de la toilette, tant son attitude aristocratique, la fierté exprimée par certains de ses gestes, révélaient la pureté de race et la noblesse d’âme. Elle était harmonieuse et captivante.

Quinze ans auparavant, sa tante, mademoiselle Rose de Presles, l’avait mariée au compositeur de musique Leprince-Mirbel, garçon d’avenir et presque aussi jeune qu’elle. L’union sembla d’abord heureuse. Marie-Magdeleine de Presles, pleine de foi en son mari, pleine d’enthousiasme pour son talent, vécut trois années d’enchantement. Puis, soudain, elle tomba de son ciel en s’apercevant que Mirbel la trompait avec une vieille chanteuse qui lançait ses œuvres.

Cette découverte se fit de la manière la plus banale. Magdeleine entra un jour dans le cabinet de travail de son mari pour examiner, en son absence, les épreuves d’une partition qu’il corrigeait. En prenant les feuillets de musique épars sur la table, afin de juger au piano des changements que le maître apportait à son œuvre, ses regards furent attirés vers un papier ridiculement à la mode et chamarré d’une écriture invraisemblable formée de longs bâtons; machinalement, Magdeleine prit cette lettre; mais dès les premières lignes elle tomba défaillante sur une chaise. Elle en continua la lecture avec de douloureuses palpitations, les mains tremblantes, et, à moitié folle de chagrin, arriva au bout de l’horrible prose, à la fois emphatique et grivoise, de la vieille cabotine....

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Extrait: «Mon ami,...

»Je suis enfin installée et vous attends à Yerres, un de ces jours très prochains, demain, par exemple. Si vous prenez l’express de cinq heures, vous avez toute chance de faire le voyage avec Guillaume de Tanis, Jean Biroy, d’autres encore peut-être. Je vous invite tous ce même jour. Mais je compte particulièrement sur vous trois, mes chers fidèles. Ne m’écrivez pas que ceci… que cela… vous retient à Paris. Le cher Abbé sait bien que c’est le premier embarquement qui coûte à sa paresse. Tante Rose, d’ailleurs, me charge de vous dire qu’elle a fait préparer avec amour les chambres du Pavillon, et l’amour de tante Rose mérite le voyage! L’Abbé trouvera à Montgeron la voiture des invalides et pourra, si par grand hasard il est seul, rêver tout à son aise au despotisme tendre de son amie

»MAGDA.»

Lorsque madame Leprince-Mirbel eut achevé d’écrire cette lettre, elle la glissa dans une enveloppe, et, rassemblant d’autres lettres éparses sur son petit bureau, en relut avec soin les adresses.

—Voyons, n’en ai-je pas oublié? Jules Governeur, mon philosophe; Jean Biroy, mon peintre; Guillaume de Tanis, mon romancier; Savines, mon critique; d’Artigues, mon diplomate; Danaris et sa femme, celle-ci ma chère amie; Barjols, mon député; ils y sont bien tous. Bon. Maintenant donnons ces lettres au docteur; il les jettera à la poste en allant porter ses dépêches.

Madame Leprince-Mirbel se leva. C’était une femme de trente-six ans, de tournure élégante. Une grâce enveloppante émanait de tous ses gestes; elle possédait une allure aristocratique, un air «grande dame» qui ne s’acquiert pas. D’une taille souple, fine, en harmonie avec des hanches aux lignes du plus délicieux contour, elle avait aussi un pied mince et cambré, de belles mains, des mains pâles comme une hostie, aux doigts spirituels, retroussés et longs, qui suggéraient l’envie de les saisir et, à leur seul contact, donnaient la sensation troublante de posséder cette femme.

Tanis, en plaisantant, disait:

—Vos mains sont voluptueuses jusqu’à l’inconvenance.

Ses yeux cernés paraissaient d’autant plus grands que le dessus des paupières, estompé d’une teinte brune, ajoutait une étrange profondeur au regard de ses prunelles noires, brillantes comme deux agates dans le blanc nacré de l’œil. Ses cheveux blonds, légers, soyeux, abondants et ondés, ressemblaient à une coulée d’or.

Sans être ni belle, ni jolie, madame Mirbel produisait sur les hommes une impression ineffaçable, tant la finesse satinée de sa chair faisait ressortir la délicatesse de ses traits, tant son élégance accusait une science admirable de la toilette, tant son attitude aristocratique, la fierté exprimée par certains de ses gestes, révélaient la pureté de race et la noblesse d’âme. Elle était harmonieuse et captivante.

Quinze ans auparavant, sa tante, mademoiselle Rose de Presles, l’avait mariée au compositeur de musique Leprince-Mirbel, garçon d’avenir et presque aussi jeune qu’elle. L’union sembla d’abord heureuse. Marie-Magdeleine de Presles, pleine de foi en son mari, pleine d’enthousiasme pour son talent, vécut trois années d’enchantement. Puis, soudain, elle tomba de son ciel en s’apercevant que Mirbel la trompait avec une vieille chanteuse qui lançait ses œuvres.

Cette découverte se fit de la manière la plus banale. Magdeleine entra un jour dans le cabinet de travail de son mari pour examiner, en son absence, les épreuves d’une partition qu’il corrigeait. En prenant les feuillets de musique épars sur la table, afin de juger au piano des changements que le maître apportait à son œuvre, ses regards furent attirés vers un papier ridiculement à la mode et chamarré d’une écriture invraisemblable formée de longs bâtons; machinalement, Magdeleine prit cette lettre; mais dès les premières lignes elle tomba défaillante sur une chaise. Elle en continua la lecture avec de douloureuses palpitations, les mains tremblantes, et, à moitié folle de chagrin, arriva au bout de l’horrible prose, à la fois emphatique et grivoise, de la vieille cabotine....

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