Author: | Geneviève Bollème, Jacques Le Goff | ISBN: | 9782021253825 |
Publisher: | Seuil (réédition numérique FeniXX) | Publication: | January 1, 1986 |
Imprint: | Seuil (réédition numérique FeniXX) | Language: | French |
Author: | Geneviève Bollème, Jacques Le Goff |
ISBN: | 9782021253825 |
Publisher: | Seuil (réédition numérique FeniXX) |
Publication: | January 1, 1986 |
Imprint: | Seuil (réédition numérique FeniXX) |
Language: | French |
Qu'y a-t-il sous le mot peuple ? Qu'est-ce que parler du peuple, ou au nom du peuple ? C'est, par un acte de rupture, s'extraire de lui et le faire apparaître ainsi comme pure spontanéité, se dérobant à toute prise ; mais c'est, du même coup, se mettre dans la situation de l'intellectuel qui, de Platon à Sartre, se tient en dehors du peuple dont il parle. Michelet, le poète chinois Luxun et Simone Weil illustrent, dans des contextes culturels différents, cette difficulté de l'intellectuel à rejoindre le peuple. À parler pour le peuple, il le manque ; à s'identifier à lui, il perd la parole. Aujourd'hui, le peuple est devenu objet de science (recherche des traditions populaires, enquêtes, récits de vie, interviews...). Cette volonté de connaître manifeste l'intention d'atténuer, voire d'effacer, la charge politique que l'histoire a fait porter au mot peuple. Mais le populaire déborde les musées et archives où l'on prétend le cantonner... Tenter de le penser, c'est s'approcher de ce premier état du langage (autrefois nommé naïveté) qui commande ses manifestations et ses expressions. C'est surtout être attentif à ce moment où, comme sous la Révolution française, une assemblée prend brusquement conscience d'elle-même en un mouvement inattendu et violent – ce moment où le peuple devient quelqu'un.
Qu'y a-t-il sous le mot peuple ? Qu'est-ce que parler du peuple, ou au nom du peuple ? C'est, par un acte de rupture, s'extraire de lui et le faire apparaître ainsi comme pure spontanéité, se dérobant à toute prise ; mais c'est, du même coup, se mettre dans la situation de l'intellectuel qui, de Platon à Sartre, se tient en dehors du peuple dont il parle. Michelet, le poète chinois Luxun et Simone Weil illustrent, dans des contextes culturels différents, cette difficulté de l'intellectuel à rejoindre le peuple. À parler pour le peuple, il le manque ; à s'identifier à lui, il perd la parole. Aujourd'hui, le peuple est devenu objet de science (recherche des traditions populaires, enquêtes, récits de vie, interviews...). Cette volonté de connaître manifeste l'intention d'atténuer, voire d'effacer, la charge politique que l'histoire a fait porter au mot peuple. Mais le populaire déborde les musées et archives où l'on prétend le cantonner... Tenter de le penser, c'est s'approcher de ce premier état du langage (autrefois nommé naïveté) qui commande ses manifestations et ses expressions. C'est surtout être attentif à ce moment où, comme sous la Révolution française, une assemblée prend brusquement conscience d'elle-même en un mouvement inattendu et violent – ce moment où le peuple devient quelqu'un.