Author: | Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais | ISBN: | 1230000229168 |
Publisher: | Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais | Publication: | March 29, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais |
ISBN: | 1230000229168 |
Publisher: | Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais |
Publication: | March 29, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
EXTRAIT:
Préface
En écrivant cette préface, mon but n'est pas de rechercher oiseusement si j'ai
mis au théâtre une pièce bonne ou mauvaise; il n'est plus temps pour moi: mais
d'examiner scrupuleusement, et je le dois toujours, si j'ai fait une oeuvre
blâmable.
Personne n'étant tenu de faire une comédie qui ressemble aux autres, si je me
suis écarté d'un chemin trop battu, pour des raisons qui m'ont paru solides,
ira-t-on me juger, comme l'ont fait MM. tels, sur des règles qui ne sont pas les
miennes? imprimer puérilement que je reporte l'art à son enfance, parce que
j'entreprends de frayer un nouveau sentier à cet art dont la loi première, et
peut-être la seule, est d'amuser en instruisant? Mais ce n'est pas de cela qu'il
s'agit.
Il y a souvent très loin du mal que l'on dit d'un ouvrage à celui qu'on en
pense. Le trait qui nous poursuit, le mot qui importune reste enseveli dans le
coeur, pendant que la bouche se venge en blâmant presque tout le reste. De sorte
qu'on peut regarder comme un point établi au théâtre, qu'en fait de reproche à
l'auteur, ce qui nous affecte le plus est ce dont on parle le moins.
Il est peut-être utile de dévoiler, aux yeux de tous, ce double aspect des
comédies; et j'aurai fait encore un bon usage de la mienne, si je parviens, en
la scrutant, à fixer l'opinion publique sur ce qu'on doit entendre par ces mots:
Qu'est-ce que LA DECENCE THEATRALE?
A force de nous montrer délicats, fins connaisseurs et d'affecter, comme j'ai
dit autre part, l'hypocrisie de la décence auprès du relâchement des moeurs,
nous devenons des êtres nuls, incapables de s'amuser et de juger de ce qui leur
convient : faut-il le dire enfin? des bégueules rassasiées qui ne savent plus ce
qu'elles veulent, ni ce qu'elles doivent aimer ou rejeter. Déjà ces mots si
rebattus, bon ton, bonne compagnie, toujours ajustés au niveau de chaque
insipide coterie, et dont la latitude est si grande qu'on ne sait où ils
commencent et finissent, ont détruit la franche et vraie gaieté qui distinguait
de tout autre le comique de notre nation.
EXTRAIT:
Préface
En écrivant cette préface, mon but n'est pas de rechercher oiseusement si j'ai
mis au théâtre une pièce bonne ou mauvaise; il n'est plus temps pour moi: mais
d'examiner scrupuleusement, et je le dois toujours, si j'ai fait une oeuvre
blâmable.
Personne n'étant tenu de faire une comédie qui ressemble aux autres, si je me
suis écarté d'un chemin trop battu, pour des raisons qui m'ont paru solides,
ira-t-on me juger, comme l'ont fait MM. tels, sur des règles qui ne sont pas les
miennes? imprimer puérilement que je reporte l'art à son enfance, parce que
j'entreprends de frayer un nouveau sentier à cet art dont la loi première, et
peut-être la seule, est d'amuser en instruisant? Mais ce n'est pas de cela qu'il
s'agit.
Il y a souvent très loin du mal que l'on dit d'un ouvrage à celui qu'on en
pense. Le trait qui nous poursuit, le mot qui importune reste enseveli dans le
coeur, pendant que la bouche se venge en blâmant presque tout le reste. De sorte
qu'on peut regarder comme un point établi au théâtre, qu'en fait de reproche à
l'auteur, ce qui nous affecte le plus est ce dont on parle le moins.
Il est peut-être utile de dévoiler, aux yeux de tous, ce double aspect des
comédies; et j'aurai fait encore un bon usage de la mienne, si je parviens, en
la scrutant, à fixer l'opinion publique sur ce qu'on doit entendre par ces mots:
Qu'est-ce que LA DECENCE THEATRALE?
A force de nous montrer délicats, fins connaisseurs et d'affecter, comme j'ai
dit autre part, l'hypocrisie de la décence auprès du relâchement des moeurs,
nous devenons des êtres nuls, incapables de s'amuser et de juger de ce qui leur
convient : faut-il le dire enfin? des bégueules rassasiées qui ne savent plus ce
qu'elles veulent, ni ce qu'elles doivent aimer ou rejeter. Déjà ces mots si
rebattus, bon ton, bonne compagnie, toujours ajustés au niveau de chaque
insipide coterie, et dont la latitude est si grande qu'on ne sait où ils
commencent et finissent, ont détruit la franche et vraie gaieté qui distinguait
de tout autre le comique de notre nation.