En ce temps-là, il n’y avait pas de tombeaux sur les routes, ni de temples sur les collines. Les hommes n’existaient guère : on n’en parlait pas. La terre se livrait à la joie des dieux, et favorisait la naissance des divinités monstrueuses. C’est le temps où l’Echidna enfanta la Chimère, et Pasiphaé le Minotaure. Les petits enfants pâlissaient dans les bois, sous l’effroi du vol des dragons. Or, sur les bords humides du fleuve Eurotas, où les bois sont tellement épais qu’on n’y voit jamais la lumière, vivait une jeune fille extraordinaire, qui était bleuâtre comme la nuit, mystérieuse comme la lune mince, et douce comme la voie lactée. C’est pourquoi on la nommait Lêda. Elle était vraiment presque bleue, car le sang des iris coulait dans ses veines, et non comme aux vôtres le sang des roses. Ses ongles étaient plus bleus que ses mains, ses papilles plus bleues que sa poitrine, ses coudes et ses genoux tout à fait azurés. Ses lèvres brillaient de la couleur de ses yeux, qui étaient bleus comme l’eau profonde. Quant à ses cheveux en liberté, ils étaient sombres et bleus autant que le ciel nocturne et vivaient le long de ses bras, si bien qu’elle paraissait ailée.
En ce temps-là, il n’y avait pas de tombeaux sur les routes, ni de temples sur les collines. Les hommes n’existaient guère : on n’en parlait pas. La terre se livrait à la joie des dieux, et favorisait la naissance des divinités monstrueuses. C’est le temps où l’Echidna enfanta la Chimère, et Pasiphaé le Minotaure. Les petits enfants pâlissaient dans les bois, sous l’effroi du vol des dragons. Or, sur les bords humides du fleuve Eurotas, où les bois sont tellement épais qu’on n’y voit jamais la lumière, vivait une jeune fille extraordinaire, qui était bleuâtre comme la nuit, mystérieuse comme la lune mince, et douce comme la voie lactée. C’est pourquoi on la nommait Lêda. Elle était vraiment presque bleue, car le sang des iris coulait dans ses veines, et non comme aux vôtres le sang des roses. Ses ongles étaient plus bleus que ses mains, ses papilles plus bleues que sa poitrine, ses coudes et ses genoux tout à fait azurés. Ses lèvres brillaient de la couleur de ses yeux, qui étaient bleus comme l’eau profonde. Quant à ses cheveux en liberté, ils étaient sombres et bleus autant que le ciel nocturne et vivaient le long de ses bras, si bien qu’elle paraissait ailée.