Author: | Charles Sorel | ISBN: | 1230001379129 |
Publisher: | HF | Publication: | October 9, 2016 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Charles Sorel |
ISBN: | 1230001379129 |
Publisher: | HF |
Publication: | October 9, 2016 |
Imprint: | |
Language: | French |
Extrait : Aussi ne se peignoit-il jamais qu’avec ses doigts, et dans toutes les compagnies c’étoit sa contenance ordinaire. Sa peau étoit grenue comme celle des maroquins, et sa couleur brune étoit réchauffée par de rouges bourgeons qui la perçoient en assez bon nombre. En général, il avoit une vraie mine de satyre. La fente de sa bouche étoit copieuse et ses dents fort aiguës, belles dispositions pour mordre. Il l’accompagnoit d’ordinaire d’un ris badin dont je ne sçais point la cause, si ce n’est qu’il vouloit montrer les dents à tout le monde. Ses yeux, gros et bouffis, avoient quelque chose de plus que d’être à fleur de tête. Il y en a qui ont cru que, comme on se met sur des balcons en saillie hors des fenêtres pour découvrir de plus loin, aussi la nature lui avoit mis des yeux en dehors, pour découvrir ce qui se faisoit de mal chez ses voisins. Jamais il n’y eut un homme plus médisant ni plus envieux ; il ne trouvoit rien de bien fait à sa fantaisie. S’il eût été du conseil de la création, nous n’aurions rien vu de tout ce que nous voyons à présent. C’étoit le plus grand réformateur en pis qui ait jamais été, et il corrigeoit toutes les choses bonnes pour les mettre mal. Il n’a point vu d’assemblée de gens illustres qu’il n’ait tâché de la décrier ; encore, pour mieux cacher son venin, il faisoit semblant d’en faire l’éloge, lorsqu’il en faisoit en effet la censure, et il ressembloit à ces bêtes dangereuses qui en pensant flatter égratignent ; car il ne pouvoit souffrir la gloire des autres ; et autant de choses qu’on mettoit au jour, c’étoient autant de tourmens qu’on lui préparoit… Sa vanité naturelle s’étoit accrue par quelque réputation qu’il avoit eue en jeunesse, à cause de quelques petits ouvrages qui avoient eu quelque débit [12]. »
Extrait : Aussi ne se peignoit-il jamais qu’avec ses doigts, et dans toutes les compagnies c’étoit sa contenance ordinaire. Sa peau étoit grenue comme celle des maroquins, et sa couleur brune étoit réchauffée par de rouges bourgeons qui la perçoient en assez bon nombre. En général, il avoit une vraie mine de satyre. La fente de sa bouche étoit copieuse et ses dents fort aiguës, belles dispositions pour mordre. Il l’accompagnoit d’ordinaire d’un ris badin dont je ne sçais point la cause, si ce n’est qu’il vouloit montrer les dents à tout le monde. Ses yeux, gros et bouffis, avoient quelque chose de plus que d’être à fleur de tête. Il y en a qui ont cru que, comme on se met sur des balcons en saillie hors des fenêtres pour découvrir de plus loin, aussi la nature lui avoit mis des yeux en dehors, pour découvrir ce qui se faisoit de mal chez ses voisins. Jamais il n’y eut un homme plus médisant ni plus envieux ; il ne trouvoit rien de bien fait à sa fantaisie. S’il eût été du conseil de la création, nous n’aurions rien vu de tout ce que nous voyons à présent. C’étoit le plus grand réformateur en pis qui ait jamais été, et il corrigeoit toutes les choses bonnes pour les mettre mal. Il n’a point vu d’assemblée de gens illustres qu’il n’ait tâché de la décrier ; encore, pour mieux cacher son venin, il faisoit semblant d’en faire l’éloge, lorsqu’il en faisoit en effet la censure, et il ressembloit à ces bêtes dangereuses qui en pensant flatter égratignent ; car il ne pouvoit souffrir la gloire des autres ; et autant de choses qu’on mettoit au jour, c’étoient autant de tourmens qu’on lui préparoit… Sa vanité naturelle s’étoit accrue par quelque réputation qu’il avoit eue en jeunesse, à cause de quelques petits ouvrages qui avoient eu quelque débit [12]. »