Author: | Henri Grégoire | ISBN: | 1230001282764 |
Publisher: | Eric HELAN | Publication: | March 12, 2016 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Henri Grégoire |
ISBN: | 1230001282764 |
Publisher: | Eric HELAN |
Publication: | March 12, 2016 |
Imprint: | |
Language: | French |
Depuis Vespasien, l’histoire des Juifs n’offre que des scenes de douleur & des tragédies sanglantes : onze cent mille périrent au siège de Jérusalem ; deux cent trente-sept mille autres étoient morts tant à la défense de Jopata, qu’en bataillant dans les plaines de la Palestine ; & cette contrée, jadis florissante, dévastée par le démon de la guerre, étoit une solitude couverte de cadavres & de décombres. Ce Peuple malheureux vit alors son temple brûlé, ses villes rasées, sa capitale en cendres, & son corps politique dissous. Devenu le jouet de la fortune & le rebut de la terre, toujours haletant entre les poignards & la mort, il crut sans doute que la mesure de ses maux étoit comblée ; il se trompoit : un Empereur Romain sut encore enchérir sur les cruautés précédentes. Le fer, le feu, la faim firent périr près de quatre millions de Juifs sous le regne d’Adrien, y compris cinq cent quatre-vingt mille égorgés dans la révolte de Barchochebas(1), & l’on ravit à ceux qui échapperent en petit nombre, la consolation de contempler, même de loin, les ruines de Jérusalem foulée sous les pieds des Gentils. Auparavant, on les voyoit, couverts de haillons, parcourir en sanglotant la montagne des Oliviers & les débris du temple ; ils furent réduits(2) à économiser sur leur misere, pour payer cette grace à l’avarice des Soldats. À ce prix, ils obtinrent la faveur signalée d’y venir pleurer le jour anniversaire du sac de leur Cité ; & les Juifs achetoient le droit de répandre des larmes dans les lieux où ils avoient acheté & répandu le sang de Jesus Christ.
Pour aggraver leur désastre, on les força de quitter à jamais une patrie à laquelle ils étoient attachés par tant de liens, & que des motifs si puissans rendoient chere à leurs cœurs. En s’arrachant des lieux qui les ont vu naître, vers lesquels sans cesse ils tournent les yeux, mais qu’ils ne reverront plus, ils se traînent dans tous les coins du globe pour y mendier des asyles. Ils vont en tremblant baiser les pieds des nations, qui les levent pour les écraser, & chez lesquelles ils n’échappent aux tourmens qu’à la faveur du mépris : leurs soupirs même sont traités comme des cris de rebellion : & la fureur populaire, qui s’allume comme un incendie, parcourt les provinces en les massacrant. On craint de se rappeller les horribles boucheries d’Alexandrie & de Césarée, où les intervalles du carnage n’étoient que le temps nécessaire au délassement des bourreaux...
Depuis Vespasien, l’histoire des Juifs n’offre que des scenes de douleur & des tragédies sanglantes : onze cent mille périrent au siège de Jérusalem ; deux cent trente-sept mille autres étoient morts tant à la défense de Jopata, qu’en bataillant dans les plaines de la Palestine ; & cette contrée, jadis florissante, dévastée par le démon de la guerre, étoit une solitude couverte de cadavres & de décombres. Ce Peuple malheureux vit alors son temple brûlé, ses villes rasées, sa capitale en cendres, & son corps politique dissous. Devenu le jouet de la fortune & le rebut de la terre, toujours haletant entre les poignards & la mort, il crut sans doute que la mesure de ses maux étoit comblée ; il se trompoit : un Empereur Romain sut encore enchérir sur les cruautés précédentes. Le fer, le feu, la faim firent périr près de quatre millions de Juifs sous le regne d’Adrien, y compris cinq cent quatre-vingt mille égorgés dans la révolte de Barchochebas(1), & l’on ravit à ceux qui échapperent en petit nombre, la consolation de contempler, même de loin, les ruines de Jérusalem foulée sous les pieds des Gentils. Auparavant, on les voyoit, couverts de haillons, parcourir en sanglotant la montagne des Oliviers & les débris du temple ; ils furent réduits(2) à économiser sur leur misere, pour payer cette grace à l’avarice des Soldats. À ce prix, ils obtinrent la faveur signalée d’y venir pleurer le jour anniversaire du sac de leur Cité ; & les Juifs achetoient le droit de répandre des larmes dans les lieux où ils avoient acheté & répandu le sang de Jesus Christ.
Pour aggraver leur désastre, on les força de quitter à jamais une patrie à laquelle ils étoient attachés par tant de liens, & que des motifs si puissans rendoient chere à leurs cœurs. En s’arrachant des lieux qui les ont vu naître, vers lesquels sans cesse ils tournent les yeux, mais qu’ils ne reverront plus, ils se traînent dans tous les coins du globe pour y mendier des asyles. Ils vont en tremblant baiser les pieds des nations, qui les levent pour les écraser, & chez lesquelles ils n’échappent aux tourmens qu’à la faveur du mépris : leurs soupirs même sont traités comme des cris de rebellion : & la fureur populaire, qui s’allume comme un incendie, parcourt les provinces en les massacrant. On craint de se rappeller les horribles boucheries d’Alexandrie & de Césarée, où les intervalles du carnage n’étoient que le temps nécessaire au délassement des bourreaux...