Author: | Jean-Jacques Rousseau | ISBN: | 1230001404715 |
Publisher: | Editions MARQUES | Publication: | October 29, 2016 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Jean-Jacques Rousseau |
ISBN: | 1230001404715 |
Publisher: | Editions MARQUES |
Publication: | October 29, 2016 |
Imprint: | |
Language: | French |
Rousseau Jean-Jacques – Rousseau juge de Jean-Jacques, dialogues : De retour à Paris en 1770 après huit ans d’exil, Rousseau, qui vit modestement de son métier de copiste, est invité dans les salons à lire des extraits de ses Confessions. Contre son attente, ces lectures semi-privées se heurtent au silence gêné des auditeurs. Craignant les révélations compromettantes pour elle-même et ses amis philosophes, Mme d’Epinay, son ancienne protectrice, les fait interdire. Se sentant trahi et espionné de toute part, Rousseau passe alors à l’offensive et, reprenant la plume, compose ses Dialogues. Ce long travail d’apologie l’occupera par intermittence de 1772 à 1776, mais ne paraîtra qu’à titre posthume. Persuadé, non sans raison, qu’il est victime d’un vaste complot occulte et que des ennemis anonymes cherchent à détruire son œuvre en publiant sous son nom des textes dont il n’est pas l’auteur, Rousseau se constitue à la fois juge, avocat et partie et met en scène le procès qu’on lui refuse dans la réalité. Son plaidoyer, organisé en trois Dialogues, oppose deux personnages : un certain « Rousseau », qu’il ne faut pas confondre avec l’auteur, mais qui connaît parfaitement ses écrits ; en face de lui, un Français, porte-parole naïf de toutes les calomnies qui circulent au sujet du dénommé « Jean-Jacques », tiers absent et unique objet de ces débats.
Dans le Premier Dialogue, Le Français, qui n’a jamais vu ni lu « Jean-Jacques », déclare qu’il est un « monstre exécrable », un imposteur et un plagiaire. « Rousseau » riposte non sans ironie que l’auteur de La Nouvelle Héloïse et de l’Émile ne saurait être celui des crimes qu’on lui impute. Il y aurait donc deux « Jean-Jacques »… Pour éclairer ce mystère, ils conviennent, l’un d’aller lui rendre visite, l’autre de lire ses livres. « Rousseau » rapporte dans le Deuxième Dialogue que l’individu qu’il a rencontré n’a rien d’un criminel. C’est un honnête homme, un innocent, un rêveur timide et maladroit, qui se considère avant tout comme « le peintre de la nature et l’historien du cœur humain ». Dans le Troisième Dialogue, contrepartie intellectuelle du portrait moral qui précède, le Français, qui a enfin lu « Jean-Jacques », commente en détail ses lectures et reconnaît qu’il en a été ému jusqu’au fond de l’âme. Revenu de ses préjugés, il accepte, sinon de rencontrer « J.-J. », du moins de contribuer à sa réhabilitation.
Œuvre brillante, mais déroutante, Rousseau juge de Jean-Jacques est le « J’accuse » d’un écrivain qui ne s’appartient plus, qui ne maîtrise plus sa réputation, et qui en souffre d’autant plus cruellement qu’en « défenseur intransigeant de la vertu » (Starobinski), il s’est toujours senti redevable de son image*. Pour nombre de lecteurs, le clivage du nom et du prénom, allié au ressassement obsessionnel de griefs tant réels qu’imaginaires, sont les symptômes d’un état paranoïaque qui atteint ici son paroxysme. Pour d’autres au contraire, cet autoportrait à deux voix est une habile « mise en scène de soi » (Delormas) par laquelle l’auteur, reprenant fictivement le contrôle de son nom, cherche en même temps à assurer l’intégrité et la pérennité de son œuvre**. On constate en effet au terme de Dialogues que Rousseau ne s’adresse plus aux Français, ni au roi, ni même à Dieu, et que, renonçant à obtenir gain de cause auprès des hommes de son siècle, il s’en remet désormais à la postérité, certain qu’elle seule saura un jour lui rendre justice. (*Jean Starobinski, Accuser et séduire. Essais sur Jean-Jacques Rousseau(Paris, Gallimard, 2012) 38-39. **Pascale Delormas, De l’autobiographie à la mise en scène de soi. Le cas Rousseau. (Limoges, Lambert-Lucas, 2012), 46, 197.)
Rousseau Jean-Jacques – Rousseau juge de Jean-Jacques, dialogues : De retour à Paris en 1770 après huit ans d’exil, Rousseau, qui vit modestement de son métier de copiste, est invité dans les salons à lire des extraits de ses Confessions. Contre son attente, ces lectures semi-privées se heurtent au silence gêné des auditeurs. Craignant les révélations compromettantes pour elle-même et ses amis philosophes, Mme d’Epinay, son ancienne protectrice, les fait interdire. Se sentant trahi et espionné de toute part, Rousseau passe alors à l’offensive et, reprenant la plume, compose ses Dialogues. Ce long travail d’apologie l’occupera par intermittence de 1772 à 1776, mais ne paraîtra qu’à titre posthume. Persuadé, non sans raison, qu’il est victime d’un vaste complot occulte et que des ennemis anonymes cherchent à détruire son œuvre en publiant sous son nom des textes dont il n’est pas l’auteur, Rousseau se constitue à la fois juge, avocat et partie et met en scène le procès qu’on lui refuse dans la réalité. Son plaidoyer, organisé en trois Dialogues, oppose deux personnages : un certain « Rousseau », qu’il ne faut pas confondre avec l’auteur, mais qui connaît parfaitement ses écrits ; en face de lui, un Français, porte-parole naïf de toutes les calomnies qui circulent au sujet du dénommé « Jean-Jacques », tiers absent et unique objet de ces débats.
Dans le Premier Dialogue, Le Français, qui n’a jamais vu ni lu « Jean-Jacques », déclare qu’il est un « monstre exécrable », un imposteur et un plagiaire. « Rousseau » riposte non sans ironie que l’auteur de La Nouvelle Héloïse et de l’Émile ne saurait être celui des crimes qu’on lui impute. Il y aurait donc deux « Jean-Jacques »… Pour éclairer ce mystère, ils conviennent, l’un d’aller lui rendre visite, l’autre de lire ses livres. « Rousseau » rapporte dans le Deuxième Dialogue que l’individu qu’il a rencontré n’a rien d’un criminel. C’est un honnête homme, un innocent, un rêveur timide et maladroit, qui se considère avant tout comme « le peintre de la nature et l’historien du cœur humain ». Dans le Troisième Dialogue, contrepartie intellectuelle du portrait moral qui précède, le Français, qui a enfin lu « Jean-Jacques », commente en détail ses lectures et reconnaît qu’il en a été ému jusqu’au fond de l’âme. Revenu de ses préjugés, il accepte, sinon de rencontrer « J.-J. », du moins de contribuer à sa réhabilitation.
Œuvre brillante, mais déroutante, Rousseau juge de Jean-Jacques est le « J’accuse » d’un écrivain qui ne s’appartient plus, qui ne maîtrise plus sa réputation, et qui en souffre d’autant plus cruellement qu’en « défenseur intransigeant de la vertu » (Starobinski), il s’est toujours senti redevable de son image*. Pour nombre de lecteurs, le clivage du nom et du prénom, allié au ressassement obsessionnel de griefs tant réels qu’imaginaires, sont les symptômes d’un état paranoïaque qui atteint ici son paroxysme. Pour d’autres au contraire, cet autoportrait à deux voix est une habile « mise en scène de soi » (Delormas) par laquelle l’auteur, reprenant fictivement le contrôle de son nom, cherche en même temps à assurer l’intégrité et la pérennité de son œuvre**. On constate en effet au terme de Dialogues que Rousseau ne s’adresse plus aux Français, ni au roi, ni même à Dieu, et que, renonçant à obtenir gain de cause auprès des hommes de son siècle, il s’en remet désormais à la postérité, certain qu’elle seule saura un jour lui rendre justice. (*Jean Starobinski, Accuser et séduire. Essais sur Jean-Jacques Rousseau(Paris, Gallimard, 2012) 38-39. **Pascale Delormas, De l’autobiographie à la mise en scène de soi. Le cas Rousseau. (Limoges, Lambert-Lucas, 2012), 46, 197.)