Moi quelque part

Fiction & Literature, Literary
Cover of the book Moi quelque part by ANDRÉ BAILLON, GILBERT TEROL
View on Amazon View on AbeBooks View on Kobo View on B.Depository View on eBay View on Walmart
Author: ANDRÉ BAILLON ISBN: 1230000211883
Publisher: GILBERT TEROL Publication: January 22, 2014
Imprint: Language: French
Author: ANDRÉ BAILLON
ISBN: 1230000211883
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: January 22, 2014
Imprint:
Language: French

Ce que j’étais

Un monsieur de la ville : un faux-col, des manchettes, des cheveux sur les oreilles pour qu’on me sût artiste.

Pour vivre, je travaillais quelque part à quelque chose. Tout aussi bien j’eusse travaillé autre part à autre chose.

J’avais une bouche moyenne, une moustache moyenne, une taille moyenne ; l’esprit évidemment au-dessus de la moyenne, comme tout le monde.

Je savais que la Vénus de Milo est une belle œuvre et la Joconde aussi.

À cause de mes cheveux, on me croyait peintre. Je répondais : « Non, écrivain. » Je ciselais mes phrases ; à défaut d’âme, je les fourrais de mots : cela ne valait rien.

Je m’ignorais comme tous ceux qui se cherchent dans un miroir. La nature, je la connaissais par les horizons captifs en deux mètres de toiles. Aussi par les « Oh ! » des poètes, et les « Ah ! » des romanciers.

Je n’avais jamais regardé un arbre,

J’ignorais pourquoi au retour la campagne me rendait si triste.

Des idées, j’en avais. Mais où s’enfermer pour les mettre nues et les étreindre. Autant prendre la première qui passe sur le trottoir de tout le monde.

Je me croyais très fort, parce que je ne saluais plus ni prêtres, ni processions.

Au café, je me grisais. Quand un bourgogne était vieux, je claquais de la langue. « Quel bon bourgogne ! »

Je suivais des femmes, j’avais des femmes, surtout pour le dire aux amis.

Quand j’avais de l’argent, je voyageais, je prenais des trams, j’achetais des livres ; quand il me manquait, j’empruntais.

— Jeune ?

— On l’est toujours.

— Au physique ?

— Les genoux trop gros. Des pieds de timide qui s’appuient sur le bord et tournent un peu vers l’intérieur.

— Marié ?

— Oui, une femme robuste, matérielle et maternelle, Marie ; très bonne : beaucoup de cœur, dans beaucoup de poitrine.

— Votre moral ?

— Un estomac de muffle. Aussi des nerfs de muffle.

— Et puis ?

— Comme tout le monde vaniteux ; hypocrite comme tout le monde ; égoïste comme tout le monde.

— Mais encore ?

— Alors vous voulez que je vous lance à la tête vos propres ordures ?

View on Amazon View on AbeBooks View on Kobo View on B.Depository View on eBay View on Walmart

Ce que j’étais

Un monsieur de la ville : un faux-col, des manchettes, des cheveux sur les oreilles pour qu’on me sût artiste.

Pour vivre, je travaillais quelque part à quelque chose. Tout aussi bien j’eusse travaillé autre part à autre chose.

J’avais une bouche moyenne, une moustache moyenne, une taille moyenne ; l’esprit évidemment au-dessus de la moyenne, comme tout le monde.

Je savais que la Vénus de Milo est une belle œuvre et la Joconde aussi.

À cause de mes cheveux, on me croyait peintre. Je répondais : « Non, écrivain. » Je ciselais mes phrases ; à défaut d’âme, je les fourrais de mots : cela ne valait rien.

Je m’ignorais comme tous ceux qui se cherchent dans un miroir. La nature, je la connaissais par les horizons captifs en deux mètres de toiles. Aussi par les « Oh ! » des poètes, et les « Ah ! » des romanciers.

Je n’avais jamais regardé un arbre,

J’ignorais pourquoi au retour la campagne me rendait si triste.

Des idées, j’en avais. Mais où s’enfermer pour les mettre nues et les étreindre. Autant prendre la première qui passe sur le trottoir de tout le monde.

Je me croyais très fort, parce que je ne saluais plus ni prêtres, ni processions.

Au café, je me grisais. Quand un bourgogne était vieux, je claquais de la langue. « Quel bon bourgogne ! »

Je suivais des femmes, j’avais des femmes, surtout pour le dire aux amis.

Quand j’avais de l’argent, je voyageais, je prenais des trams, j’achetais des livres ; quand il me manquait, j’empruntais.

— Jeune ?

— On l’est toujours.

— Au physique ?

— Les genoux trop gros. Des pieds de timide qui s’appuient sur le bord et tournent un peu vers l’intérieur.

— Marié ?

— Oui, une femme robuste, matérielle et maternelle, Marie ; très bonne : beaucoup de cœur, dans beaucoup de poitrine.

— Votre moral ?

— Un estomac de muffle. Aussi des nerfs de muffle.

— Et puis ?

— Comme tout le monde vaniteux ; hypocrite comme tout le monde ; égoïste comme tout le monde.

— Mais encore ?

— Alors vous voulez que je vous lance à la tête vos propres ordures ?

More books from GILBERT TEROL

Cover of the book Sacs et parchemins by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Par mer et par terre : le corsaire by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Sébastien Roch by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book La Petite Dorrit, Annoté Tome I by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Cahiers du Cercle Proudhon by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Avatar by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Les Pionniers, Annoté by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book L’envers du journalisme by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Expédition de l'Astrolabe by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Le sorcier de l’île d’Anticosti by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Les Secrets de la Princesse de Cadignan by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Les Monikins annoté by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book La Famille Kaekebroeck by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book Ferragus chef des Dévorants by ANDRÉ BAILLON
Cover of the book L'Homme qui a vue le diable by ANDRÉ BAILLON
We use our own "cookies" and third party cookies to improve services and to see statistical information. By using this website, you agree to our Privacy Policy