Author: | Léon Bloy | ISBN: | 1230000285517 |
Publisher: | Léon Bloy | Publication: | December 13, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Léon Bloy |
ISBN: | 1230000285517 |
Publisher: | Léon Bloy |
Publication: | December 13, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
EXTRAIT:
« Quand vous recevrez cette lettre, mon cher ami, j’aurai achevé de tuer mon père. Le pauvre homme agonise, et mourra, dit-on, avant le jour.
« Il est deux heures du matin. Je suis seul dans une chambre voisine, la vieille femme qui le garde m’ayant fait entendre qu’il valait mieux que les yeux du moribond ne me rencontrassent pas et qu’on m’avertirait quand il en serait temps.
« Je ne sens actuellement aucune douleur ni aucune impression morale nettement distincte d’une confuse mélancolie, d’une indécise peur de ce qui va venir. J’ai déjà vu mourir et je sais que, demain, ce sera terrible. Mais, en ce moment, rien ; les vagues de mon cœur sont immobiles. J’ai l’anesthésie d’un assommé. Impossible de prier, impossible de pleurer, impossible de lire. Je vous écris donc, puisqu’une âme livrée à son propre néant n’a d’autre ressource que l’imbécile gymnastique littéraire de le formuler.
« Je suis parricide, pourtant, telle est l’unique vision de mon esprit ! J’entends d’ici l’intolérable hoquet de cette agonie qui est véritablement mon œuvre, — œuvre de damné qui s’est imposée à moi avec le despotisme du destin !
EXTRAIT:
« Quand vous recevrez cette lettre, mon cher ami, j’aurai achevé de tuer mon père. Le pauvre homme agonise, et mourra, dit-on, avant le jour.
« Il est deux heures du matin. Je suis seul dans une chambre voisine, la vieille femme qui le garde m’ayant fait entendre qu’il valait mieux que les yeux du moribond ne me rencontrassent pas et qu’on m’avertirait quand il en serait temps.
« Je ne sens actuellement aucune douleur ni aucune impression morale nettement distincte d’une confuse mélancolie, d’une indécise peur de ce qui va venir. J’ai déjà vu mourir et je sais que, demain, ce sera terrible. Mais, en ce moment, rien ; les vagues de mon cœur sont immobiles. J’ai l’anesthésie d’un assommé. Impossible de prier, impossible de pleurer, impossible de lire. Je vous écris donc, puisqu’une âme livrée à son propre néant n’a d’autre ressource que l’imbécile gymnastique littéraire de le formuler.
« Je suis parricide, pourtant, telle est l’unique vision de mon esprit ! J’entends d’ici l’intolérable hoquet de cette agonie qui est véritablement mon œuvre, — œuvre de damné qui s’est imposée à moi avec le despotisme du destin !