Author: | Benjamin Franklin | ISBN: | 1230000284879 |
Publisher: | JCA | Publication: | December 10, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Benjamin Franklin |
ISBN: | 1230000284879 |
Publisher: | JCA |
Publication: | December 10, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
AMI LECTEUR,
J’ai ouï dire que rien ne fait autant de plaisir à un auteur, que de voir ses ouvrages cités avec vénération par d’autres savans écrivains. Il m’est rarement arrivé de jouir de ce plaisir ; car, quoique je puisse dire, sans vanité, que, depuis un quart de siècle, je me suis fait annuellement un nom distingué parmi les auteurs (d’almanachs), il ne m’est guère arrivé, j’ignore pour quel motif, de voir mes confrères les écrivains dans le même genre, m’honorer de quelques éloges, ni aucun auteur faire la moindre mention de moi ; de sorte que, sans le petit profit effectif que j’ai fait sur mes productions, la disette d’applaudissemens m’aurait totalement découragé.
J’ai conclu à la fin que le meilleur juge de mon mérite était le peuple, puisqu’il achetait mon almanach, d’autant plus qu’en me répandant dans le monde, sans être connu, j’ai souvent entendu répéter par celui-ci ou celui-là quelqu’un de mes adages, en ajoutant toujours à la fin : comme dit le bonhomme Richard. Cela m’a fait quelque plaisir, et m’a prouvé que non-seulement on faisait cas de mes leçons, mais qu’on avait encore quelque respect pour mon autorité ; et j’avoue que, pour encourager d’autant plus le monde à se rappeler mes maximes et à les répéter, il m’est arrivé quelquefois de me citer moi-même du ton le plus grave. Jugez d’après cela combien je dus être content d’une aventure que je vais vous rapporter.
AMI LECTEUR,
J’ai ouï dire que rien ne fait autant de plaisir à un auteur, que de voir ses ouvrages cités avec vénération par d’autres savans écrivains. Il m’est rarement arrivé de jouir de ce plaisir ; car, quoique je puisse dire, sans vanité, que, depuis un quart de siècle, je me suis fait annuellement un nom distingué parmi les auteurs (d’almanachs), il ne m’est guère arrivé, j’ignore pour quel motif, de voir mes confrères les écrivains dans le même genre, m’honorer de quelques éloges, ni aucun auteur faire la moindre mention de moi ; de sorte que, sans le petit profit effectif que j’ai fait sur mes productions, la disette d’applaudissemens m’aurait totalement découragé.
J’ai conclu à la fin que le meilleur juge de mon mérite était le peuple, puisqu’il achetait mon almanach, d’autant plus qu’en me répandant dans le monde, sans être connu, j’ai souvent entendu répéter par celui-ci ou celui-là quelqu’un de mes adages, en ajoutant toujours à la fin : comme dit le bonhomme Richard. Cela m’a fait quelque plaisir, et m’a prouvé que non-seulement on faisait cas de mes leçons, mais qu’on avait encore quelque respect pour mon autorité ; et j’avoue que, pour encourager d’autant plus le monde à se rappeler mes maximes et à les répéter, il m’est arrivé quelquefois de me citer moi-même du ton le plus grave. Jugez d’après cela combien je dus être content d’une aventure que je vais vous rapporter.