Author: | E.T.A. Hoffmann | ISBN: | 1230000648165 |
Publisher: | pb | Publication: | September 6, 2015 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | E.T.A. Hoffmann |
ISBN: | 1230000648165 |
Publisher: | pb |
Publication: | September 6, 2015 |
Imprint: | |
Language: | French |
La providence voulut, dans ses mystérieux décrets, que le chef de
l’État fût enlevé à son peuple dans ce moment d’affliction générale. Le
doge Andrea Dandolo, que les Vénitiens nommaient leur cher petit comte,
il caro contino,mourut accablé du poids de ses soucis et de ses travaux. Il
était généralement chéri, car il ne passait jamais sur la place de Saint-
Marc, sans distribuer aux uns des consolations et des conseils, et aux
autres des secours et de l’argent ; et lorsque les cloches de la grande église
annoncèrent sa mort par leurs sons lugubres et prolongés, ce fut une désolation
universelle. Les Vénitiens avaient perdu leur appui, leur espérance ;
ils n’avaient plus qu’à courber la tête sous le joug des Génois : c’est ainsi
qu’on se lamentait, et cependant la perte de Dandolo ne changeait en
rien la situation extérieure de la république. En effet, le bon petit comte
vivait volontiers dans la paix et le repos ; il aimait mieux suivre la marche
mystérieuse des constellations que les détours de la politique étrangère,
et il s’entendait mieux à conduire la procession du saint jour de Pâques
qu’à mener une armée. Il s’agit alors de nommer un doge qui réunit les
talents militaires d’un général à la sagesse d’un magistrat. Les sénateurs
s’assemblèrent donc, mais on ne vit que des visages aba?us, aux regards
fixes, aux yeux mornes et à demi fermés. Où trouver un homme qui prît
le gouvernail d’une main ferme ? Le vieux sénateur Marino Bodoeri prit
enfin la parole...
La providence voulut, dans ses mystérieux décrets, que le chef de
l’État fût enlevé à son peuple dans ce moment d’affliction générale. Le
doge Andrea Dandolo, que les Vénitiens nommaient leur cher petit comte,
il caro contino,mourut accablé du poids de ses soucis et de ses travaux. Il
était généralement chéri, car il ne passait jamais sur la place de Saint-
Marc, sans distribuer aux uns des consolations et des conseils, et aux
autres des secours et de l’argent ; et lorsque les cloches de la grande église
annoncèrent sa mort par leurs sons lugubres et prolongés, ce fut une désolation
universelle. Les Vénitiens avaient perdu leur appui, leur espérance ;
ils n’avaient plus qu’à courber la tête sous le joug des Génois : c’est ainsi
qu’on se lamentait, et cependant la perte de Dandolo ne changeait en
rien la situation extérieure de la république. En effet, le bon petit comte
vivait volontiers dans la paix et le repos ; il aimait mieux suivre la marche
mystérieuse des constellations que les détours de la politique étrangère,
et il s’entendait mieux à conduire la procession du saint jour de Pâques
qu’à mener une armée. Il s’agit alors de nommer un doge qui réunit les
talents militaires d’un général à la sagesse d’un magistrat. Les sénateurs
s’assemblèrent donc, mais on ne vit que des visages aba?us, aux regards
fixes, aux yeux mornes et à demi fermés. Où trouver un homme qui prît
le gouvernail d’une main ferme ? Le vieux sénateur Marino Bodoeri prit
enfin la parole...