VOYAGES AU FRONT de Dunkerque à Belfort

Nonfiction, Travel, Family Travel, Reference
Cover of the book VOYAGES AU FRONT de Dunkerque à Belfort by EDITH WHARTON, Jwarlal
View on Amazon View on AbeBooks View on Kobo View on B.Depository View on eBay View on Walmart
Author: EDITH WHARTON ISBN: 1230002337784
Publisher: Jwarlal Publication: May 24, 2018
Imprint: Language: French
Author: EDITH WHARTON
ISBN: 1230002337784
Publisher: Jwarlal
Publication: May 24, 2018
Imprint:
Language: French

Ce livre est parmi les classiques populaires les plus vendus "bestseller" de leur époque. Voici un extrait de ce bel ouvrage :

LE VISAGE DE PARIS

Août 1914.

Le 30 juillet dernier, allant en automobile de Poitiers vers le Nord, nous avions déjeuné au bord de la route, sous des pommiers à la lisière d’un champ. D’autres champs s’étendaient à droite et à gauche, jusqu’à l’orée d’un bois d’où émergeait un clocher de village. Tout alentour, {2}c’était le calme de midi et le paysage discret et ordonné que le souvenir du voyageur se plaît à évoquer comme particulièrement français. Parfois, même aux yeux qui les connaissent le mieux, ces champs tirés au cordeau, ces villages gris et ramassés, semblent tout simplement plats et ternes. A d’autres moments, pour l’imagination sensible, chaque motte de terre, chaque sillon uniforme témoigne de l’attachement vigilant et ininterrompu de générations fidèles au sol. Par cette douce après-midi de juillet, cet attachement s’exprimait dans toutes les lignes du paysage que nous avions sous les yeux. Dans le grand silence environnant, l’air semblait rempli du long murmure de l’effort humain, du rythme des tâches souvent répétées: la sérénité souriante du {3}spectacle dissipait les rumeurs de guerre qui nous poursuivaient depuis le matin.

Tout le jour, des bandes de nuages orageux avaient assombri le ciel; mais quand nous atteignîmes Chartres, vers quatre heures, ils avaient disparu derrière l’horizon, et la ville était tellement saturée de soleil qu’en entrant dans la cathédrale on croyait pénétrer dans l’épaisse obscurité d’une église espagnole. De prime abord, aucun détail n’était visible: nous étions dans une nuit caverneuse. Puis, à mesure que les ombres s’éclaircissaient et prenaient corps en piliers, en voûtes et en nervures, il en jaillit une soudaine averse de lumière multicolore. Encadrés par ces ténèbres de velours, baignant dans le flamboiement d’un soleil de plein été, les vitraux familiers paraissaient étrangement{4} lointains et pourtant d’une intensité écrasante. Tantôt ils s’élargissaient, semblables à des étangs aux rives sombres éclaboussés du soleil couchant; tantôt ils scintillaient menaçants, comme des boucliers d’archanges guerriers. Quelques-uns étaient des cataractes de saphirs, d’autres des roses tombées de la tunique d’une sainte, d’autres encore de grands plats ciselés sur lesquels étaient jetés les joyaux de la couronne céleste, d’autres des voiles de caravelles cinglant vers les îles Fortunées; et sur le mur occidental les feux dispersés de la rosace étaient suspendus comme une constellation dans une nuit d’Afrique. Quand on abaissait les regards de ces harmonies éthérées, les masses sombres de l’édifice, toutes voilées et enveloppées de brume piquée de quelques lumières{5} d’autel, semblaient figurer la vie terrestre, avec ses ombres, ses déserts arides et ses verts îlots d’illusion. Tout ce que peut être une grande cathédrale, tout ce qu’elle peut signifier, toute la puissance d’apaisement qu’elle peut exhaler en notre âme, toute la richesse de détails qu’elle peut fondre en une seule expression de force et de beauté, tout cela, la cathédrale de Chartres nous l’a donné en cette heure unique...

Le soleil se couchait quand nous atteignîmes les portes de Paris. Au pied des hauteurs de Saint-Cloud et de Suresnes les longues nappes d’eau de la Seine miroitaient de l’éclat rose bleuté d’un Monet. Le Bois s’étendait autour de nous dans la quiétude recouvrée d’un soir de fête, et les pelouses de Bagatelle étaient{6} aussi fraîches qu’en juin. Au delà de l’Arc de Triomphe, la pente des Champs-Élysées descendait dans une buée poudrée de soleil vers la brume des fontaines et l’obélisque éthéré; et, sous les arbres des avenues qui en rayonnaient, les courants de la vie refluaient, gagnant le centre de Paris. La ville resplendissante, faite pour les arts raffinés de la paix, semblait dormir au bord de son fleuve, au pied de la tour Eiffel, comme une princesse de légende sous la garde de son géant fidèle.

View on Amazon View on AbeBooks View on Kobo View on B.Depository View on eBay View on Walmart

Ce livre est parmi les classiques populaires les plus vendus "bestseller" de leur époque. Voici un extrait de ce bel ouvrage :

LE VISAGE DE PARIS

Août 1914.

Le 30 juillet dernier, allant en automobile de Poitiers vers le Nord, nous avions déjeuné au bord de la route, sous des pommiers à la lisière d’un champ. D’autres champs s’étendaient à droite et à gauche, jusqu’à l’orée d’un bois d’où émergeait un clocher de village. Tout alentour, {2}c’était le calme de midi et le paysage discret et ordonné que le souvenir du voyageur se plaît à évoquer comme particulièrement français. Parfois, même aux yeux qui les connaissent le mieux, ces champs tirés au cordeau, ces villages gris et ramassés, semblent tout simplement plats et ternes. A d’autres moments, pour l’imagination sensible, chaque motte de terre, chaque sillon uniforme témoigne de l’attachement vigilant et ininterrompu de générations fidèles au sol. Par cette douce après-midi de juillet, cet attachement s’exprimait dans toutes les lignes du paysage que nous avions sous les yeux. Dans le grand silence environnant, l’air semblait rempli du long murmure de l’effort humain, du rythme des tâches souvent répétées: la sérénité souriante du {3}spectacle dissipait les rumeurs de guerre qui nous poursuivaient depuis le matin.

Tout le jour, des bandes de nuages orageux avaient assombri le ciel; mais quand nous atteignîmes Chartres, vers quatre heures, ils avaient disparu derrière l’horizon, et la ville était tellement saturée de soleil qu’en entrant dans la cathédrale on croyait pénétrer dans l’épaisse obscurité d’une église espagnole. De prime abord, aucun détail n’était visible: nous étions dans une nuit caverneuse. Puis, à mesure que les ombres s’éclaircissaient et prenaient corps en piliers, en voûtes et en nervures, il en jaillit une soudaine averse de lumière multicolore. Encadrés par ces ténèbres de velours, baignant dans le flamboiement d’un soleil de plein été, les vitraux familiers paraissaient étrangement{4} lointains et pourtant d’une intensité écrasante. Tantôt ils s’élargissaient, semblables à des étangs aux rives sombres éclaboussés du soleil couchant; tantôt ils scintillaient menaçants, comme des boucliers d’archanges guerriers. Quelques-uns étaient des cataractes de saphirs, d’autres des roses tombées de la tunique d’une sainte, d’autres encore de grands plats ciselés sur lesquels étaient jetés les joyaux de la couronne céleste, d’autres des voiles de caravelles cinglant vers les îles Fortunées; et sur le mur occidental les feux dispersés de la rosace étaient suspendus comme une constellation dans une nuit d’Afrique. Quand on abaissait les regards de ces harmonies éthérées, les masses sombres de l’édifice, toutes voilées et enveloppées de brume piquée de quelques lumières{5} d’autel, semblaient figurer la vie terrestre, avec ses ombres, ses déserts arides et ses verts îlots d’illusion. Tout ce que peut être une grande cathédrale, tout ce qu’elle peut signifier, toute la puissance d’apaisement qu’elle peut exhaler en notre âme, toute la richesse de détails qu’elle peut fondre en une seule expression de force et de beauté, tout cela, la cathédrale de Chartres nous l’a donné en cette heure unique...

Le soleil se couchait quand nous atteignîmes les portes de Paris. Au pied des hauteurs de Saint-Cloud et de Suresnes les longues nappes d’eau de la Seine miroitaient de l’éclat rose bleuté d’un Monet. Le Bois s’étendait autour de nous dans la quiétude recouvrée d’un soir de fête, et les pelouses de Bagatelle étaient{6} aussi fraîches qu’en juin. Au delà de l’Arc de Triomphe, la pente des Champs-Élysées descendait dans une buée poudrée de soleil vers la brume des fontaines et l’obélisque éthéré; et, sous les arbres des avenues qui en rayonnaient, les courants de la vie refluaient, gagnant le centre de Paris. La ville resplendissante, faite pour les arts raffinés de la paix, semblait dormir au bord de son fleuve, au pied de la tour Eiffel, comme une princesse de légende sous la garde de son géant fidèle.

More books from Jwarlal

Cover of the book The Brothers Karamazov by EDITH WHARTON
Cover of the book A QUOI TIENT L'AMOUR Contes de France et d'Amérique by EDITH WHARTON
Cover of the book AMES DORMANTES by EDITH WHARTON
Cover of the book LE DIABLE AMOUREUX L'HONNEUR Perdu Et Recouvré En Partie Et Revanche by EDITH WHARTON
Cover of the book Heath's Modern Language Series LA MÈRE DE LA MARQUISE by EDITH WHARTON
Cover of the book SCÈNES DE LA VIE DE JEUNESSE Nouvelles (1851) by EDITH WHARTON
Cover of the book QUELQUES CRÉATURES DE CE TEMPS by EDITH WHARTON
Cover of the book THE ROOM IN THE DRAGON VOLANT by EDITH WHARTON
Cover of the book The Old Northwest A Chronicle of the Ohio Valley and Beyond by EDITH WHARTON
Cover of the book A DOLL'S HOUSE by EDITH WHARTON
Cover of the book LOUISE DE LA VALLIERE by EDITH WHARTON
Cover of the book LA PSYCHOLOGIE COMME SCIENCE NATURELLE SON PRÉSENT & SON AVENIR by EDITH WHARTON
Cover of the book LA RELIGIEUSE by EDITH WHARTON
Cover of the book WUTHERING HEIGHTS by EDITH WHARTON
Cover of the book UNE MALADIE MORALE LE MAL DU SIECLE by EDITH WHARTON
We use our own "cookies" and third party cookies to improve services and to see statistical information. By using this website, you agree to our Privacy Policy