Author: | Daniel Lesueur | ISBN: | 1230003050200 |
Publisher: | Paris : C. Lévy, 1882 | Publication: | January 27, 2019 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Daniel Lesueur |
ISBN: | 1230003050200 |
Publisher: | Paris : C. Lévy, 1882 |
Publication: | January 27, 2019 |
Imprint: | |
Language: | French |
Extrait: Huit heures du matin: c’était bien tôt pour se présenter chez le jeune comte René de Laverdie! Le valet de chambre fut tout surpris d’entendre résonner la sonnette de l’appartement à une heure aussi matinale. Lorsqu’il eut ouvert, son étonnement ne diminua point. Il reconnut l’ami le plus intime de son maître, le vicomte Alphonse de Linières, mais aussitôt il remarqua sur les traits du visiteur l’expression d’une vive inquiétude.
—Le comte est chez lui? C’est bien. Est-il levé? L’avez-vous vu?
—Non, monsieur. Mais aujourd’hui je dois réveiller M. le comte. Il est à peu près l’heure que M. le comte m’a indiquée, et si monsieur désirait…
—Restez, restez, François. C’est moi qui le réveillerai.
Et, en homme qui connaissait bien la maison et s’y considérait comme chez lui, Alphonse de Linières traversa vivement l’antichambre et le salon, allant droit à la porte de la chambre à coucher. Mais, arrivé là, il s’arrêta. Sa main toucha le bouton, puis s’abaissa, indécise et tremblante.
Il songeait au dernier débris de la fortune de son ami, englouti cette nuit même au jeu.
On lui avait raconté presque légèrement cette perte énorme de soixante-dix mille francs. On n’avait vu là qu’une nouvelle folie du comte René, une mésaventure à laquelle il ne penserait plus le lendemain. Mais lui, Alphonse, il avait aussitôt deviné que c’était un coup de désespoir, un appel suprême à la chance, à laquelle, sans doute, s’était fié le malheureux qui voulait sauver son honneur, toutes les joies de sa vie, sa vie même peut-être.
Aussi, tandis qu’il se tenait, indécis, devant la porte fermée, son imagination lui peignait d’effrayantes images. Il voyait René en face de ces cartes maudites, riant avec l’angoisse au cœur; mais surtout il croyait l’apercevoir, là, derrière ce mur, à deux pas de lui, étendu, livide, avec le trou noir d’une balle de pistolet dans la tempe.
Extrait: Huit heures du matin: c’était bien tôt pour se présenter chez le jeune comte René de Laverdie! Le valet de chambre fut tout surpris d’entendre résonner la sonnette de l’appartement à une heure aussi matinale. Lorsqu’il eut ouvert, son étonnement ne diminua point. Il reconnut l’ami le plus intime de son maître, le vicomte Alphonse de Linières, mais aussitôt il remarqua sur les traits du visiteur l’expression d’une vive inquiétude.
—Le comte est chez lui? C’est bien. Est-il levé? L’avez-vous vu?
—Non, monsieur. Mais aujourd’hui je dois réveiller M. le comte. Il est à peu près l’heure que M. le comte m’a indiquée, et si monsieur désirait…
—Restez, restez, François. C’est moi qui le réveillerai.
Et, en homme qui connaissait bien la maison et s’y considérait comme chez lui, Alphonse de Linières traversa vivement l’antichambre et le salon, allant droit à la porte de la chambre à coucher. Mais, arrivé là, il s’arrêta. Sa main toucha le bouton, puis s’abaissa, indécise et tremblante.
Il songeait au dernier débris de la fortune de son ami, englouti cette nuit même au jeu.
On lui avait raconté presque légèrement cette perte énorme de soixante-dix mille francs. On n’avait vu là qu’une nouvelle folie du comte René, une mésaventure à laquelle il ne penserait plus le lendemain. Mais lui, Alphonse, il avait aussitôt deviné que c’était un coup de désespoir, un appel suprême à la chance, à laquelle, sans doute, s’était fié le malheureux qui voulait sauver son honneur, toutes les joies de sa vie, sa vie même peut-être.
Aussi, tandis qu’il se tenait, indécis, devant la porte fermée, son imagination lui peignait d’effrayantes images. Il voyait René en face de ces cartes maudites, riant avec l’angoisse au cœur; mais surtout il croyait l’apercevoir, là, derrière ce mur, à deux pas de lui, étendu, livide, avec le trou noir d’une balle de pistolet dans la tempe.