Author: | Edmond de Goncourt | ISBN: | 1230000227893 |
Publisher: | Edmond de Goncourt | Publication: | March 25, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Edmond de Goncourt |
ISBN: | 1230000227893 |
Publisher: | Edmond de Goncourt |
Publication: | March 25, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
EXTRAIT:
Dans les deux hémisphères, c'est donc la même injustice pour tout talent indépendant du passé! Voici le peintre qui a victorieusement enlevé la peinture de son pays aux influences persanes et chinoises et qui, par une étude pour ainsi dire religieuse de la nature, l'a rajeunie, l'a renouvelée, l'a faite vraiment toute japonaise; voici le peintre universel qui, avec le dessin le plus vivant, a reproduit l'homme, la femme, l'oiseau, le poisson, l'arbre, la fleur, le brin d'herbe; voici le peintre qui aurait exécuté 30 000 dessins ou peintures[7]; voici le peintre qui est le vrai créateur de l'Oukiyô yé[8], le fondateur de l'ÉCOLE VULGAIRE, c'est-à-dire l'homme qui ne se contentant pas, à l'imitation des peintres académiques de l'école de Tosa, de représenter, dans une convention précieuse, les fastes de la cour, la vie officielle des hauts dignitaires, l'artificiel pompeux des existences aristocratiques, a fait entrer, en son oeuvre, l'humanité entière de son pays, dans une réalité échappant aux exigences nobles de la peinture de là-bas; voici enfin le passionné, l'affolé de son art, qui signe ses productions: fou de dessin... Eh! bien, ce peintre--en dehors du culte que lui avaient voué ses élèves,--a été considéré par ses contemporains comme un amuseur de la canaille, un bas artiste aux productions indignes d'être regardées par les sérieux hommes de goût de l'Empire du Lever du Soleil. Et ce mépris, dont m'entretenait encore hier le peintre américain La Farge, à la suite des conversations qu'il avait eues autrefois au Japon avec les peintres idéalistes du pays, a continué jusqu'à ces derniers jours où, nous les Européens, mais les Français en première ligne[9], nous avons révélé à la patrie d'Hokousaï le grand artiste qu'elle a perdu il y a un demi-siècle.
EXTRAIT:
Dans les deux hémisphères, c'est donc la même injustice pour tout talent indépendant du passé! Voici le peintre qui a victorieusement enlevé la peinture de son pays aux influences persanes et chinoises et qui, par une étude pour ainsi dire religieuse de la nature, l'a rajeunie, l'a renouvelée, l'a faite vraiment toute japonaise; voici le peintre universel qui, avec le dessin le plus vivant, a reproduit l'homme, la femme, l'oiseau, le poisson, l'arbre, la fleur, le brin d'herbe; voici le peintre qui aurait exécuté 30 000 dessins ou peintures[7]; voici le peintre qui est le vrai créateur de l'Oukiyô yé[8], le fondateur de l'ÉCOLE VULGAIRE, c'est-à-dire l'homme qui ne se contentant pas, à l'imitation des peintres académiques de l'école de Tosa, de représenter, dans une convention précieuse, les fastes de la cour, la vie officielle des hauts dignitaires, l'artificiel pompeux des existences aristocratiques, a fait entrer, en son oeuvre, l'humanité entière de son pays, dans une réalité échappant aux exigences nobles de la peinture de là-bas; voici enfin le passionné, l'affolé de son art, qui signe ses productions: fou de dessin... Eh! bien, ce peintre--en dehors du culte que lui avaient voué ses élèves,--a été considéré par ses contemporains comme un amuseur de la canaille, un bas artiste aux productions indignes d'être regardées par les sérieux hommes de goût de l'Empire du Lever du Soleil. Et ce mépris, dont m'entretenait encore hier le peintre américain La Farge, à la suite des conversations qu'il avait eues autrefois au Japon avec les peintres idéalistes du pays, a continué jusqu'à ces derniers jours où, nous les Européens, mais les Français en première ligne[9], nous avons révélé à la patrie d'Hokousaï le grand artiste qu'elle a perdu il y a un demi-siècle.