Quel place représente la justice dans la littérature suédoise ?
L’idée d’étudier les rapports entre droit et littérature vient du monde anglo-saxon et plus précisément américain. Cette idée a donné lieu à la création d’un courant de pensée dont le livre Law’s Stories représente actuellement le bréviaire sur les campus américains.
D’une part ce mouvement a généré des études nouvelles sur quelques grands textes du patrimoine mondial tels que Antigone, Billy Budd, Sailor, Le Procès ou encore L’Etranger, dont les problèmes juridiques ont ainsi fait l’objet d’une attention plus fouillée et plus technique. D’autre part, le discours des textes juridiques et jurisprudentiels a été examiné d’un point de vue littéraire ou plus générale ment linguistique. [...]
Pourquoi appliquer les méthodes de ce mouvement au cas suédois ? Deux raisons au moins viennent à l’esprit. La première est que le mot suédois pour « justice », rättvisa, est absent de très nombreux dictionnaires modernes. La plupart des dictionnaires postérieurs au Ordbok öfver Svenska Språket de 1853 semblent procéder selon l’hypothèse, lourde de conséquence, que l’entrée rätt est suffisante pour définir à la fois rätt et rättvisa. Cela semble affirmer que la justice et la conformité aux règlements sont une seule et même chose. Cela ne va pas de soi et on peut être tenté de se demander quel état de fait a poussé les auteurs de dictionnaires à diffuser une telle opinion, et quelles en sont les conséquences pour le rapport entre le droit et les lettres dans la société suédoise.
Cet ouvrage littéraire, regroupant les actes d'un colloque, permettra de présenter la justice au sein de la littérature suédoise.
À PROPOS DES AUTEURS
Philippe Bouquet est traducteur de littérature suédoise. Il a notamment traduit Aniara le roman du prix Nobel de littérature suédois Harry Martinson.
Pascale Voilley est également traductrice et a travaillé avec de nombreuses maisons d'édition.
EXTRAIT
Droit et littérature. Le rapprochement de ces deux termes est en soi un paradoxe, tant ce qu’ils désignent semble au premier abord incompatible. Mais l’existence même de ce colloque implique que la réflexion d’intervenants venus d’horizons différents est à même de réduire cette apparente contradiction et de mettre en évidence les liens qui peuvent s’établir — à différents niveaux, entre ces deux notions. Nul ne contestera que l’énoncé juridique est fort éloigné de notre conception commune du récit littéraire et qu’il se caractérise par un langage bien spécifique ayant recours non seulement à un jargon technique, mais à une syntaxe et un style rebutants pour le non spécialiste, et en tout cas à l’opposé de l’esthétique supposée du texte narratif.
Quel place représente la justice dans la littérature suédoise ?
L’idée d’étudier les rapports entre droit et littérature vient du monde anglo-saxon et plus précisément américain. Cette idée a donné lieu à la création d’un courant de pensée dont le livre Law’s Stories représente actuellement le bréviaire sur les campus américains.
D’une part ce mouvement a généré des études nouvelles sur quelques grands textes du patrimoine mondial tels que Antigone, Billy Budd, Sailor, Le Procès ou encore L’Etranger, dont les problèmes juridiques ont ainsi fait l’objet d’une attention plus fouillée et plus technique. D’autre part, le discours des textes juridiques et jurisprudentiels a été examiné d’un point de vue littéraire ou plus générale ment linguistique. [...]
Pourquoi appliquer les méthodes de ce mouvement au cas suédois ? Deux raisons au moins viennent à l’esprit. La première est que le mot suédois pour « justice », rättvisa, est absent de très nombreux dictionnaires modernes. La plupart des dictionnaires postérieurs au Ordbok öfver Svenska Språket de 1853 semblent procéder selon l’hypothèse, lourde de conséquence, que l’entrée rätt est suffisante pour définir à la fois rätt et rättvisa. Cela semble affirmer que la justice et la conformité aux règlements sont une seule et même chose. Cela ne va pas de soi et on peut être tenté de se demander quel état de fait a poussé les auteurs de dictionnaires à diffuser une telle opinion, et quelles en sont les conséquences pour le rapport entre le droit et les lettres dans la société suédoise.
Cet ouvrage littéraire, regroupant les actes d'un colloque, permettra de présenter la justice au sein de la littérature suédoise.
À PROPOS DES AUTEURS
Philippe Bouquet est traducteur de littérature suédoise. Il a notamment traduit Aniara le roman du prix Nobel de littérature suédois Harry Martinson.
Pascale Voilley est également traductrice et a travaillé avec de nombreuses maisons d'édition.
EXTRAIT
Droit et littérature. Le rapprochement de ces deux termes est en soi un paradoxe, tant ce qu’ils désignent semble au premier abord incompatible. Mais l’existence même de ce colloque implique que la réflexion d’intervenants venus d’horizons différents est à même de réduire cette apparente contradiction et de mettre en évidence les liens qui peuvent s’établir — à différents niveaux, entre ces deux notions. Nul ne contestera que l’énoncé juridique est fort éloigné de notre conception commune du récit littéraire et qu’il se caractérise par un langage bien spécifique ayant recours non seulement à un jargon technique, mais à une syntaxe et un style rebutants pour le non spécialiste, et en tout cas à l’opposé de l’esthétique supposée du texte narratif.