Author: | Florence Balique | ISBN: | 9782130738534 |
Publisher: | Presses Universitaires de France | Publication: | January 1, 2015 |
Imprint: | Presses Universitaires de France | Language: | French |
Author: | Florence Balique |
ISBN: | 9782130738534 |
Publisher: | Presses Universitaires de France |
Publication: | January 1, 2015 |
Imprint: | Presses Universitaires de France |
Language: | French |
« Les romans devraient être interdits par l’État » selon le professeur Kien, savant solitaire dans Auto-da-fé d’Elias Canetti. En quoi la littérature est-elle dangereuse ? Elle ne connaît de vérité que de passage. Elle se plaît à décliner les formes changeantes que l’imagination fait percevoir ou disparaître. Le charme qu’elle exerce menace ainsi l’identité. S’il est une séduction littéraire, elle réside dans l’invention d’une subjectivité impersonnelle : on ne parle pas de soi en littérature. Écrire procède d’un effort exceptionnel pour sortir du carcan de la personne, briser le miroir, s’évader de la psyché en faisant résonner, dans et par le style, une parole défigurée. L’autofiction se situe aux antipodes de l’enjeu littéraire majeur, lorsqu’elle prend la forme d’un déballage des émois dérisoires qui composent une vie. Dès lors, notre réflexion relève d’un double défi : extraire la littérature de la gangue du savoir critique qui risque de l’asphyxier sans que le refus de l’objectivité ne coïncide avec un retour au mirage de l’expression de soi.
Cette défense et illustration du pouvoir des fables implique un regard déniaisé sur le plaisir de l’imagination. La fiction ne demande pas un « oui » servile, adhésion à un monde cohérent qui comblerait les fissures de la réalité ; elle fait éprouver jusqu’au vertige de l’idée inattendue, dans l’exploration de mondes logiquement autonomes. Déployant une pensée déconcertante, la fiction met la raison à la question, égarée au-delà des terres familières de l’argumentation. Détournons la voix du poète : « Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance » ; la littérature est enfer pour l’esprit de sérieux qui s’y effraie, s’accrochant à son identité, faute de tenter la quête de soi. La passion littéraire commence par l’abandon de réponses dépassées en vue d’une imagination en liberté, déculpabilisée. À l’heure où tout le monde prétend raconter sa vie et la publier, comptons que ce livre, réveillant le questionnement, servira la force littéraire, invitation à lire et écrire des livres dignes d’être brûlés.
« Les romans devraient être interdits par l’État » selon le professeur Kien, savant solitaire dans Auto-da-fé d’Elias Canetti. En quoi la littérature est-elle dangereuse ? Elle ne connaît de vérité que de passage. Elle se plaît à décliner les formes changeantes que l’imagination fait percevoir ou disparaître. Le charme qu’elle exerce menace ainsi l’identité. S’il est une séduction littéraire, elle réside dans l’invention d’une subjectivité impersonnelle : on ne parle pas de soi en littérature. Écrire procède d’un effort exceptionnel pour sortir du carcan de la personne, briser le miroir, s’évader de la psyché en faisant résonner, dans et par le style, une parole défigurée. L’autofiction se situe aux antipodes de l’enjeu littéraire majeur, lorsqu’elle prend la forme d’un déballage des émois dérisoires qui composent une vie. Dès lors, notre réflexion relève d’un double défi : extraire la littérature de la gangue du savoir critique qui risque de l’asphyxier sans que le refus de l’objectivité ne coïncide avec un retour au mirage de l’expression de soi.
Cette défense et illustration du pouvoir des fables implique un regard déniaisé sur le plaisir de l’imagination. La fiction ne demande pas un « oui » servile, adhésion à un monde cohérent qui comblerait les fissures de la réalité ; elle fait éprouver jusqu’au vertige de l’idée inattendue, dans l’exploration de mondes logiquement autonomes. Déployant une pensée déconcertante, la fiction met la raison à la question, égarée au-delà des terres familières de l’argumentation. Détournons la voix du poète : « Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance » ; la littérature est enfer pour l’esprit de sérieux qui s’y effraie, s’accrochant à son identité, faute de tenter la quête de soi. La passion littéraire commence par l’abandon de réponses dépassées en vue d’une imagination en liberté, déculpabilisée. À l’heure où tout le monde prétend raconter sa vie et la publier, comptons que ce livre, réveillant le questionnement, servira la force littéraire, invitation à lire et écrire des livres dignes d’être brûlés.