Contes de Caliban

Fiction & Literature, Classics, Historical
Cover of the book Contes de Caliban by Émile Bergerat, Émile Bergerat
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Author: Émile Bergerat ISBN: 1230000222791
Publisher: Émile Bergerat Publication: March 4, 2014
Imprint: Language: French
Author: Émile Bergerat
ISBN: 1230000222791
Publisher: Émile Bergerat
Publication: March 4, 2014
Imprint:
Language: French

EXTRAIT:

 

CONTES FACÉTIEUX

BÉJAREC LE FAISEUR D'ENFANTS

Vous rappelez-vous l'aventure de cette Américaine extravagante qui amena un jour ses deux filles à Victor Hugo pour que le grand poète daignât semer un peu de la graine de génie lyrique dans la race yankee ? Malgré les affirmations les plus positives, je n'avais jamais beaucoup cru à cette histoire paradoxale. Mais j'avoue que je suis très ébranlé depuis que je connais Béjarec, le faiseur d'enfants».

Yan Béjarec a aujourd'hui soixante-seize ans passés; il n'exerce plus. Mais pendant trente années, il a propagé l'espèce humaine dans nos villages. Comment vous expliquer cela, ô raffinés de la ville, dont tant de romans subtils et de comédies bourgeoises ont faussé la philosophie naturelle et dévoyé le sens moral ? Magistrats de mon pays qui, en pleine crise de dépopulation, autorisez encore le mari infertile à tuer les amants de sa femme, et vous, prédicateurs de la scène, qui ne voulez pas voir que l'adultère n'est, le plus souvent, qu'une reprise normale de la nature, souffrez que je vous présente ce vieux Celte d'Yan Béjarec, coq des poules qui n'en ont pas, et le plus honnête des hommes.

Pour avoir le prétexte de lui laisser quelque monnaie dans la main, car il est pauvre, je lui fais quelquefois poser la barbe et les cheveux, qu'il a encore magnifiques. Par la surabondance pileuse, il ressemble au Jupiter Olympien de Phidias, ce type indétrônable de la beauté mâle, et le père de tous les dieux. Béjarec, à trente ans, devait être prodigieux, et rien de ce qu'on en raconte ici ne m'étonne. Or, la nature, toujours inexorablement logique, avait doublé sa puissance attractive d'une vertu d'étalon qui en était l'expression même, si j'ose pénétrer ses mystères, et lui fatalisait sa destinée terrestre. Il était de toute éternité créé pour tenir tête au malthusianisme. Quant au reste, zéro, et le vieux Yan est plus bête encore que cent choux qui pomment ! Qu'eût-il fait de l'esprit, le bon être, puisque c'est, de nos attributs, celui que la femme prise le moins ?

Béjarec fut d'abord marié. Son mariage même avait, sinon désuni, du moins séparé deux soeurs jumelles qui s'adoraient et ne s'étaient point quittées une minute depuis leur enfance. L'une s'appelait Marie-Anne et l'autre Anne-Marie. Cette dernière se maria à son tour, et le sort voulut que, tandis que Marie-Anne moulait tous les neuf mois un petit ou une petite Béjarec, Anne-Marie demeurât désastreusement stérile. C'est une grande douleur dans nos campagnes et une honte, et les paysans, quoique chrétiens, ont là-dessus des idées du plus pur paganisme. Et Marie-Anne se désolait du chagrin de la chère soeur bréhaigne.

Elle s'en ouvrit un soir à celui qu'elle appelait par badinage son à-tout-coup», et, de fil en aiguille, elle en vint à lui suggérer de s'en mêler un peu. Cela resterait en famille et elle n'était pas jalouse d'Anne-Marie. Peut-on l'être de sa chair même ? Et puis, elle en avait son compte, étant grosse du onzième, et vraiment sa pauvre bessonne était trop déshéritée, avec son mari invalide !

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EXTRAIT:

 

CONTES FACÉTIEUX

BÉJAREC LE FAISEUR D'ENFANTS

Vous rappelez-vous l'aventure de cette Américaine extravagante qui amena un jour ses deux filles à Victor Hugo pour que le grand poète daignât semer un peu de la graine de génie lyrique dans la race yankee ? Malgré les affirmations les plus positives, je n'avais jamais beaucoup cru à cette histoire paradoxale. Mais j'avoue que je suis très ébranlé depuis que je connais Béjarec, le faiseur d'enfants».

Yan Béjarec a aujourd'hui soixante-seize ans passés; il n'exerce plus. Mais pendant trente années, il a propagé l'espèce humaine dans nos villages. Comment vous expliquer cela, ô raffinés de la ville, dont tant de romans subtils et de comédies bourgeoises ont faussé la philosophie naturelle et dévoyé le sens moral ? Magistrats de mon pays qui, en pleine crise de dépopulation, autorisez encore le mari infertile à tuer les amants de sa femme, et vous, prédicateurs de la scène, qui ne voulez pas voir que l'adultère n'est, le plus souvent, qu'une reprise normale de la nature, souffrez que je vous présente ce vieux Celte d'Yan Béjarec, coq des poules qui n'en ont pas, et le plus honnête des hommes.

Pour avoir le prétexte de lui laisser quelque monnaie dans la main, car il est pauvre, je lui fais quelquefois poser la barbe et les cheveux, qu'il a encore magnifiques. Par la surabondance pileuse, il ressemble au Jupiter Olympien de Phidias, ce type indétrônable de la beauté mâle, et le père de tous les dieux. Béjarec, à trente ans, devait être prodigieux, et rien de ce qu'on en raconte ici ne m'étonne. Or, la nature, toujours inexorablement logique, avait doublé sa puissance attractive d'une vertu d'étalon qui en était l'expression même, si j'ose pénétrer ses mystères, et lui fatalisait sa destinée terrestre. Il était de toute éternité créé pour tenir tête au malthusianisme. Quant au reste, zéro, et le vieux Yan est plus bête encore que cent choux qui pomment ! Qu'eût-il fait de l'esprit, le bon être, puisque c'est, de nos attributs, celui que la femme prise le moins ?

Béjarec fut d'abord marié. Son mariage même avait, sinon désuni, du moins séparé deux soeurs jumelles qui s'adoraient et ne s'étaient point quittées une minute depuis leur enfance. L'une s'appelait Marie-Anne et l'autre Anne-Marie. Cette dernière se maria à son tour, et le sort voulut que, tandis que Marie-Anne moulait tous les neuf mois un petit ou une petite Béjarec, Anne-Marie demeurât désastreusement stérile. C'est une grande douleur dans nos campagnes et une honte, et les paysans, quoique chrétiens, ont là-dessus des idées du plus pur paganisme. Et Marie-Anne se désolait du chagrin de la chère soeur bréhaigne.

Elle s'en ouvrit un soir à celui qu'elle appelait par badinage son à-tout-coup», et, de fil en aiguille, elle en vint à lui suggérer de s'en mêler un peu. Cela resterait en famille et elle n'était pas jalouse d'Anne-Marie. Peut-on l'être de sa chair même ? Et puis, elle en avait son compte, étant grosse du onzième, et vraiment sa pauvre bessonne était trop déshéritée, avec son mari invalide !

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