Brancas ; Les amours de Quaterquem

Fiction & Literature, Classics
Cover of the book Brancas ; Les amours de Quaterquem by Alfred Assollant, Pascal Gauthier
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Author: Alfred Assollant ISBN: 1230000257907
Publisher: Pascal Gauthier Publication: August 5, 2014
Imprint: Language: French
Author: Alfred Assollant
ISBN: 1230000257907
Publisher: Pascal Gauthier
Publication: August 5, 2014
Imprint:
Language: French

Extrait du livre :

Un matin, M. Charles Brancas, avocat à Paris (rue de Tournon, 43, au premier, la porte à gauche), reçut d'un ami de province la lettre suivante :
 Vieilleville, 6 mai 1845.
 «Mon cher ami,
 «Si tu ne me prêtes pas ton éloquence pour huit jours, je suis ruiné.
 Voici l'affaire :
 «Jean-Pierre-Hippolyte Ripainsel (en 1793 Caïus-Gracchus Ripainsel), mon oncle, ancien garçon meunier, vient de mourir laissant deux millions.
 Je passe sur la douleur que ce funeste événement a causée à ses nombreux amis. Entre nous, le défunt était un ladre vert qui n'a jamais donné un centime à qui que ce soit, mais qui obligeait volontiers le premier venu à vingt, trente ou quarante pour cent. Il s'est acquis par là, dans le pays, la plus grande considération. L'histoire dit que le vieux reître, qui fut, je ne sais comment, d'abord commis aux vivres, puis fournisseur général, a fait jeûner plus d'une fois les soldats de la République et de l'Empire, qu'il les a vêtus de draps à demi-brûlés, chaussés de souliers de carton, et abreuvés de piquettes horribles où les eaux poétiques du Rhin, du Tage et du Garigliano entraient pour une bonne moitié ; mais ce sont des commérages qui ne méritent pas qu'on les relève.
 «Tout cancre qu'il était, Caïus-Gracchus Ripainsel (alias Jean-Pierre-Hippolyte) a trouvé bon de restituer, après décès, bien entendu, car le brave homme de son vivant, n'aurait pas lâché la plus petite obole.

Restituer, c'est une idée assez naturelle, pourvu qu'on restitue à ceux qu'on a dépouillés, ou aux pauvres ; mais Caïus-Gracchus ne l'entend pas ainsi. Il lègue ses deux millions à la célèbre communauté de P..., afin, dit-il, de donner aux saintes femmes qui habitent ce couvent la richesse dont elles sont si dignes. Cet acte de sa dernière volonté me plonge dans la misère.
 «Quand je dis que le testament me ruine, tu entends bien que c'est une figure de rhétorique, car j'ai du foin dans mes bottes, et n'étais pas si sot que d'attendre pour vivre l'héritage de Caïus-Gracchus ; mais c'est une brèche. Deux millions ! d'un seul coup ! La captation est notoire. De sa vie, le défunt ne mit le pied dans une église.
 

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Extrait du livre :

Un matin, M. Charles Brancas, avocat à Paris (rue de Tournon, 43, au premier, la porte à gauche), reçut d'un ami de province la lettre suivante :
 Vieilleville, 6 mai 1845.
 «Mon cher ami,
 «Si tu ne me prêtes pas ton éloquence pour huit jours, je suis ruiné.
 Voici l'affaire :
 «Jean-Pierre-Hippolyte Ripainsel (en 1793 Caïus-Gracchus Ripainsel), mon oncle, ancien garçon meunier, vient de mourir laissant deux millions.
 Je passe sur la douleur que ce funeste événement a causée à ses nombreux amis. Entre nous, le défunt était un ladre vert qui n'a jamais donné un centime à qui que ce soit, mais qui obligeait volontiers le premier venu à vingt, trente ou quarante pour cent. Il s'est acquis par là, dans le pays, la plus grande considération. L'histoire dit que le vieux reître, qui fut, je ne sais comment, d'abord commis aux vivres, puis fournisseur général, a fait jeûner plus d'une fois les soldats de la République et de l'Empire, qu'il les a vêtus de draps à demi-brûlés, chaussés de souliers de carton, et abreuvés de piquettes horribles où les eaux poétiques du Rhin, du Tage et du Garigliano entraient pour une bonne moitié ; mais ce sont des commérages qui ne méritent pas qu'on les relève.
 «Tout cancre qu'il était, Caïus-Gracchus Ripainsel (alias Jean-Pierre-Hippolyte) a trouvé bon de restituer, après décès, bien entendu, car le brave homme de son vivant, n'aurait pas lâché la plus petite obole.

Restituer, c'est une idée assez naturelle, pourvu qu'on restitue à ceux qu'on a dépouillés, ou aux pauvres ; mais Caïus-Gracchus ne l'entend pas ainsi. Il lègue ses deux millions à la célèbre communauté de P..., afin, dit-il, de donner aux saintes femmes qui habitent ce couvent la richesse dont elles sont si dignes. Cet acte de sa dernière volonté me plonge dans la misère.
 «Quand je dis que le testament me ruine, tu entends bien que c'est une figure de rhétorique, car j'ai du foin dans mes bottes, et n'étais pas si sot que d'attendre pour vivre l'héritage de Caïus-Gracchus ; mais c'est une brèche. Deux millions ! d'un seul coup ! La captation est notoire. De sa vie, le défunt ne mit le pied dans une église.
 

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