Author: | Jean Giraudoux | ISBN: | 9782246788171 |
Publisher: | Grasset | Publication: | April 1, 2014 |
Imprint: | Grasset | Language: | French |
Author: | Jean Giraudoux |
ISBN: | 9782246788171 |
Publisher: | Grasset |
Publication: | April 1, 2014 |
Imprint: | Grasset |
Language: | French |
En ce qui me concerne, les sentiments que m'inspire l'Amérique n'ont jamais été ceux de l'Européen pour une cousine adolescente, mais au contraire des sentiments filiaux. Chaque fois que je reviens manger mes griddle cakes à Boston, mes mincepies à Albany, mes pruneaux à Santa Catarina, ils ont pour moi cette saveur du passé que trouve à sa carpe à la gelée, quand il fait son pélerinage à Lwow, le galicien de Chicago. L'Amérique est mon vieux continent. Grandi à Warward, nourri à San Francisco, je reprends machinalement, dès le débarcadère, mon itinéraire ancestral, mon point entre ces gratte-ciel qui atteignent moins le ciel que la plus basse maison de Nouvelle-Angleterre, mais dans ces allées de monuments invisibles, que dans aucun autre pays je n'ai vus aussi antiques et aussi réels, et qui sont l'enthousiasme, la confiance, l'équilibre des hanches, l'hospitalité. Mon ghetto, c'est leur bloc, et je me félicite d'avoir inscrit voilà vingt ans au fronton du plus magnifique et du plus invisible cette plaque de marbre volant.
J. G.
En ce qui me concerne, les sentiments que m'inspire l'Amérique n'ont jamais été ceux de l'Européen pour une cousine adolescente, mais au contraire des sentiments filiaux. Chaque fois que je reviens manger mes griddle cakes à Boston, mes mincepies à Albany, mes pruneaux à Santa Catarina, ils ont pour moi cette saveur du passé que trouve à sa carpe à la gelée, quand il fait son pélerinage à Lwow, le galicien de Chicago. L'Amérique est mon vieux continent. Grandi à Warward, nourri à San Francisco, je reprends machinalement, dès le débarcadère, mon itinéraire ancestral, mon point entre ces gratte-ciel qui atteignent moins le ciel que la plus basse maison de Nouvelle-Angleterre, mais dans ces allées de monuments invisibles, que dans aucun autre pays je n'ai vus aussi antiques et aussi réels, et qui sont l'enthousiasme, la confiance, l'équilibre des hanches, l'hospitalité. Mon ghetto, c'est leur bloc, et je me félicite d'avoir inscrit voilà vingt ans au fronton du plus magnifique et du plus invisible cette plaque de marbre volant.
J. G.